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A trois on y va

  • Cinéma
  • 4 sur 5 étoiles
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A trois on y va
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Du très célèbre ‘Jules et Jim’ de Truffaut aux ‘Amours imaginaires’ de Dolan, en passant par ‘La Maman et la Putain’ de Jean Eustache, ‘César et Rosalie’ de Claude Sautet, sans oublier le ‘Vicky Cristina Barcelona’ de Woody Allen, le très fameux ‘The Dreamers’ de Bertolucci ou ‘Les Chansons d’amour’ de Christophe Honoré, le thème du triangle amoureux a inspiré de bien grands cinéastes. Le sixième long métrage de Jérôme Bonnell aborde pourtant ce sujet sur un air léger et avec une tonalité détonante qui lorgne du côté de la comédie.

Jeunes et amoureux, Micha (Félix Moati) et Charlotte (l’insaisissable Sophie Verbeeck) partagent un appartement à Lille, que le réalisateur prend plaisir à découvrir derrière sa caméra. Nous ne tardons pas à apprendre que Charlotte trompe son bien-aimé avec sa meilleure copine, Mélodie (interprétée par Anaïs Demoustier et son éternelle fraîcheur), qui ne laisse vraisemblablement pas Micha indifférent. Commence alors une longue partie de cache-cache, moins adulte qu’adultère, où Mélodie jongle entre ses deux amants et son job d’avocate avec la précision de l’équilibriste.

Si le film pèche un peu dans quelques-unes de ses séquences dramatiques  notamment la scène du bar, où l’authenticité des larmes d’Anaïs Demoustier reste douteuse  nous nous laissons facilement porter par ce sympathique tourbillon amoureux qui n’a heureusement rien du mélo à la française. Saupoudré d’humour et de sensualité, ‘A trois on y va’ tend d’abord vers le comique du vaudeville, avec ses marivaudages peut-être un peu naïfs (mais pas potaches), qui ont le mérite de faire gentiment sourire.

Mais une fois les dérives charnelles et affinitaires mises à nues, la petite comédie romantique prend une dimension nettement plus intéressante : le triangle amoureux  à géométrie variable jusqu’alors  glisse doucement de l’isocèle à l’équilatéral, et donne envie de croire à l’utopie de ce désir intense, pluriel et égalitaire, dont la rareté fait incontestablement la beauté. Les trois personnages se livrent à une relation libertaire à la fois innocente et solaire, célébrant un amour humaniste affranchi des barrières sexuelles, à mille lieues de la jalousie qu’implique souvent l’infidélité.

Très proche des corps et des visages de ses personnages, la caméra de Jérôme Bonnell les suit avec délicatesse, érotisme, et se saisit fort habilement de leur fragile individualité qui fait si bien leur complémentarité. Si Charlotte reste sans aucun doute le personnage le plus insondable du film, qui séduit Micha et Mélodie autant que son opacité les fascine, elle dépeint également la difficulté d’aimer et de s’offrir entièrement à quelqu’un que peut ressentir tout un chacun. Bien que le réalisateur affirme ici qu’il ne faut croire qu’en l’amour, certains seront sans doute un peu désappointés par la fin inattendue de ce long métrage, replongeant malgré lui le monde dans un cadre un peu plus conventionnel et canonique que celui qu’il nous a laissé entrevoir.

Écrit par Céleste Lafarge
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