[title]
Succès inattendu aux Etats-Unis – surpassant même au box-office, cet été, celui du dernier ‘Mission : Impossible’ –, ce biopic sur le groupe de rap N.W.A (pour Niggaz Wit Attitudes) débarque en France, dans un climat a priori plus apaisé. Car si l’écho du film apparut tonitruant outre-Atlantique, ce fut largement lié aux récents meurtres de citoyens américains noirs par des policiers blancs (dont celui du jeune Michael Brown à Ferguson, qui mit le feu aux poudres l’an dernier) : une violence raciale que dénonce amplement le long métrage au son d’un des premiers tubes du groupe, "Fuck Tha Police". Bref, ce qui s’appelle tomber à point nommé.
Troublante et percutante, cette osmose entre un film sur une époque plus ou moins révolue (celle du hip-hop américain au tournant des années 1980/1990) et l’actualité récente constitue l’un des grands points forts du film, aux côtés de la qualité de ses interprètes, tous plutôt convaincants. En revanche, pris en lui-même, le long métrage de F. Gary Gray ressemble tout de même beaucoup à une assez banale hagiographie du groupe – en particulier de Dr. Dre et Ice Cube. Et c’est là que le bât blesse : en se concentrant peu à peu sur des problèmes d’ego et de management, sur des histoires d’arnaques et de contrats foireux (typiques de l’industrie musicale, d’ailleurs – touchez-en donc un mot à Leonard Cohen ou Michel Polnareff), ‘N.W.A – Straight Outta Compton’ passe à côté de sa problématique sociale et politique, bientôt reléguée au second plan.
Voire, en saluant sans surprise le succès du groupe, le film finit en apologie de ces anciens rappeurs radicaux ayant tourné nouveaux riches bling-bling – créant le même sentiment de décalage un peu gênant qu’on pourrait avoir en payant 75 $ une place de concert pour Public Enemy à Las Vegas. Un film assez étrangement paradoxal, en somme, perdu entre dénonciation et complaisance, qui réjouira sans doute surtout les amateurs du genre.
Lire aussi notre article : Cinq conseils pour ne pas (complètement) foirer son biopic