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Une jeunesse allemande

  • Cinéma
  • 3 sur 5 étoiles
  • Recommandé
Une jeunesse allemande - Ulrike Meinhof
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

« Vivre vite, mourir jeune et faire un beau cadavre » : ironiquement, c’est cette phrase de James Dean, archétype de l’adolescent américain, qui nous trotte en tête à la sortie de la séance. Pas que les courtes vies d’Andreas Baader et de James Dean soient comparables – l’un est devenu une icône pop, l’autre un ennemi public. Simplement, le feu intérieur qui les a rapidement consumés tous deux ne cesse de poser des questions. Dont, pour Baader : pourquoi et comment un individu choisit-il de prendre part à la lutte armée pour faire valoir ses idées ? A quel moment décide-t-il de mettre sa vie dans la balance pour se battre contre les injustices ? Et de tuer, notamment des innocents ? Autant de questions insolubles auxquelles ce documentaire sur la RAF (Fraction Armée Rouge), organisation terroriste d’extrême gauche, active de 1970 à 1977 en Allemagne, ne répond évidemment pas.

Au portrait intime, Jean-Gabriel Périot a préféré le portrait politique, nourrissant son film d’images d’archives souvent passionnantes, avec très peu de voix-off. Un procédé qui avait fait des merveilles dans l’excellent documentaire d’Andrei Ujica sur Nicolae Ceausescu (‘L’Autobiographie de Nicolae Ceausescu’), mais qui laisse plus sceptique ici. ‘Une jeunesse allemande’ obéit en effet à une chronologie linéaire visant à montrer et démontrer l’histoire de la radicalisation progressive de ces jeunes gens de bonne famille (étudiants en art, avocat, journaliste, etc.), dans leur lutte pour éduquer et aider les masses. Si les films expérimentaux (principalement ceux d’Holger Meins) et les apparitions télévisées dans des débats (Ulrike Meinhof) – partie la plus réussie du film – font d‘abord office de mediums privilégiés pour développer et transmettre leurs idées, la funeste manifestation de protestation contre la venue du shah d’Iran à Berlin en juin 1967 (qui se solde par l’assassinat d’un étudiant par la police) marque un tournant décisif. A la théorie et aux discours vont alors se substituer les armes, les attentats, et la violence comme moyen.

Une histoire politique édifiante que ce trop court documentaire, parfois aride dans son montage et sa narration, effleure sans jamais vraiment embrasser. Reste des documents rares qui raviront les spécialistes de la période, mais feront certainement fuir les moins férus d’histoire. Dommage : les questions qui y sont abordées (remise en cause profonde des systèmes politique et économique, les moyens de la contestation dans une démocratie, etc.) paraîtraient presqu’indécentes aujourd’hui, dans une société capitaliste dont les membres ne semblent plus un seul instant douter du bien-fondé.

Écrit par Nicolas Hecht
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