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Alice Springs : Rétrospective

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Elle n’a pas volé la petite place qu’elle occupe dans la cour des grands photographes portraitistes. A l’ombre de Richard Avedon, Diane Arbus, Nan Goldin, Peter Lindbergh, ou de son propre mari, Helmut Newton, Alice Springs (alias June Newton), indomptable et instinctive, s’est épanouie dans une niche bien à elle. En apprenant à manier son viseur sur le tas.

Une carrière qui commence presque sur un malentendu : en 1970, son époux, alité, lui donne deux-trois conseils techniques pour qu’elle puisse le remplacer sur le shooting d’une campagne de pub pour Gitanes. Tignasse bouclée, clope au bec, regard torve, pose de macho : le mannequin se livre à Madame Newton comme si elle avait grandi dans une chambre noire. Le résultat, fort, nerveux, plaît immédiatement. Alice Springs est née, et elle a du chien.

Si l’on découvre d’abord, au fil de la rétrospective que lui consacre la MEP, les saynètes badines, dopées au shampooing et au mascara, que l’ex-actrice australienne imagine pour Jean-Louis David et une flopée de magazines de mode (Elle, Vogue…), il faut pénétrer dans la seconde salle pour jauger l'étendue magnétique de son talent. Car c’est dans le portrait, au sens traditionnel et bourgeois du terme, qu’Alice Springs excelle. D’Yves Saint Laurent à Robert Mapplethorpe, de William Burroughs à Karl Lagerfeld, la photographe immortalise le gotha artistique et mondain de son époque avec une acuité déroutante. Electrique, son objectif semble prélever l’essence du modèle, condenser dans un seul regard, dans un seul geste, toutes ses infimes particularités. Comme si les grains grisonnants des tirages constituaient d’imperceptibles empreintes ADN de l’esprit, son « Who’s who » de la jet-set parvient, en un coup d’œil, à percer l'intimité de ses sujets. Gravant quelque chose d'indicible et de primordial dans les sillons du noir et blanc.

Parmi ces visages qu’elle sculpte dans des contrastes profonds, les enveloppant souvent dans des fonds sombres, on croise également quelques Hell’s Angels et des danseurs, tout aussi puissants – preuve que l’alchimie de Springs ne découle pas que du pouvoir, de la gloire et de la notoriété de la « haute ». Si ses photos dégagent une atmosphère proche de celle d'Helmut Newton (la tension sexuelle en moins), l’œuvre de l’épouse ne possède ni la rigueur, ni le perfectionnisme de l’époux – et c’est peut-être de cette zone trouble, de ce flou artistique, qu’elle tire sa fraîcheur. Farouche, audacieuse, en quarante ans de carrière Alice Springs a su ouvrir comme peu d’autres les robinets qui viennent irriguer l’énergie entre le modèle et le photographe. Une aptitude qu’elle n’a jamais révélé de manière aussi flagrante que lorsqu’elle photographiait une série de femmes stars aux côtés de leurs nouveaux-nés. Sous l’œil de June Newton, les voilà à la fois mères et icônes, célébrités saisies dans leur intimité, et femmes, exhibées dans leur élan maternel. Telles d’improbables madones des temps modernes, brandissant une part d’elles-mêmes à bout de bras.

Infos

Site Web de l'événement
www.mep-fr.org/
Adresse
Prix
De 4 € à 7 € / Gratuit le mercredi a? partir de 17h
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