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Esther Ferrer : Face B. Image / autoportrait

  • Art, Art vidéo
  • 3 sur 5 étoiles
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Avec le temps, que deviennent les rock stars de la performance, ces légendes du monde de l’art et du féminisme des seventies ? Eh bien, elles vieillissent, comme tout le monde. Mais ça ne veut pas dire qu’elles doivent se cloîtrer chez elles, adopter cinq chats et développer une passion irrationnelle pour les pétales de fleurs fanées. Certaines, comme Esther Ferrer du haut de ses 77 ans, continuent sans relâche de se filmer, de se photographier, d’étudier les transformations de leur visage et de leur corps vieillissant. La vie de l’artiste devient alors l’essence même de la performance : une œuvre totale destinée à s’étioler, lentement, au fil des années, comme une installation de land art dont on suivrait, pas à pas, la dégradation.

Dans la lignée d'une Marina Abramovic ou d'une Valie Export (l’auto-violence et les défis extrêmes en moins), la performeuse espagnole (basque plus précisément) s'inscrit, depuis les années 1970, parmi les pionnières de l'art « action », faisant de son corps la moelle épinière d’un discours à la fois ironique et engagé. Et son œuvre s’en ressent : la déformation des images, les collages, les messages explicitement anticonformistes, l’exhibitionnisme brut de décoffrage, le questionnement de l’identité des genres et de l’individualisme… Dans leur forme et leurs préoccupations, les vidéos, photomontages et installations d’Esther Ferrer émanent d’une autre époque, et il faut se remettre dans le contexte des années pré-Photoshop, pré-avortement ou pré-Femen pour apprécier toute la radicalité d’une artiste qui n’hésite pas à imprimer son visage sur des supports en accordéon pour mieux le défigurer. A photographier ses poils pubiens pour les colorer en rouge, en vert, en bleu, en jaune. A aligner des dizaines d’autoportraits sur un mur, augmentant peu à peu l’exposition de ses photos jusqu’à ce que la dernière n’affiche plus qu’une surface blanche et vide. Une disparition.

C’est cette dimension plus philosophique – celle qui interroge la finitude de la vie et la mutation perpétuelle du corps, fugace comme du sable mouvant – qui prend une nouvelle ampleur avec l’âge. Notamment sur cette immense frise de « doubles-faces », où l’artiste appose des autoportraits pris à différentes époques de sa vie (1981, 1989, 1994, 1999, 2004, 2009, 2014) pour constater l’étendue du changement. Sans gêne, sans jugement de valeur (les choses n’étaient pas forcément mieux avant les rides), Ferrer se pose en héroïne d’une performance passive : ici, la Basque n’est pas dans l’action, mais dans l’observation d’une métamorphose qui la dépasse ; une transformation sur laquelle elle n’exerce aucun contrôle ; un processus universel. Si l’on ajoute à cela le bel accrochage du MAC/VAL, aéré et finement étudié, on ne peut que recommander cette petite incursion dans le monde d’Esther Ferrer. Version carte Vermeil.

> Horaires : du mardi au vendredi de 10h à 18h, le samedi, le dimanche et les jours fériés de midi à 19h.

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Prix
5 €
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