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Nolens/Volens

  • Art, Graffiti
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Vous ne connaissez pas la galerie P38 ? C’est normal, elle vient à peine d’ouvrir ses portes. Au cœur du quartier de Château Rouge, au-dessus du tout récent atelier Le Paris Print Club qui réunit vingt-deux jeunes artistes. Imprimeurs, graphistes, sérigraphistes, dessinateurs, designers textile… Ces artisans et ces travailleurs minutieux redonnent leurs lettres de noblesse à l'impression et à la réalisation de livres, d'estampes, d'affiches, dans une époque où virtuel et dématérialisation sont les nouveaux conquérants, aussi bien de l’art que de la communication. Vous trouverez le créatif quatuor de Banco Studio qui tisse ses motifs sur différents tissus, le trait vif et stylisé de l’illustratrice Sophie Della Corte, un espace dédié à l’art précis de la reliure, ou encore des typographes utilisant des techniques ancestrales…

En ouvrant cette galerie atypique, le Paris Print Club souhaite valoriser l’artisanat d’art. Pour sa première exposition, la P38 invite le graffeur français SAEIO à investir ses murs avec son exposition Volens/Nolens. Une petite dizaine de peintures sont présentées comme autant de bouts de murs reproduits. Dommage que ça ne soit pas comme dans la rue, qu’on n’ait pas affaire à des œuvres sauvagement taguées à la bombe. On est ici devant des toiles, au format classique, rectangulaire et régulier. Ce n’est pas tant que le graff soit exposé dans une galerie qui déboussole (il est toujours entré au musée, en sautant les portillons de sécurité ou en y étant invité), c’est surtout le cadre qui le contient qui gêne. On aurait aimé voir l’intégralité des murs recouverts, ce qui aurait conservé l'aspect subversif du graff, son principe éphémère et par là même l’impossibilité de l’acquérir. D’autant que la galerie P38, par son espace irrégulier et presque labyrinthique, se prêtait parfaitement à un tel dispositif. Mais passons outre la petite déception d’être face à de sages châssis et non à un pan de mur entier bariolé d’une peinture fougueuse et tapageuse.

Des toiles de SAEIO, vives dans leurs aplats bruts, transparaissent l’urgence et l’adrénaline. Forcément influencées par le travail mené par l’artiste dans la rue, elles témoignent pourtant d’une autre forme artistique, plus proche des arts plastiques. Penchez-vous également sur les dessins présentés sous verre, croquis nerveux de mondes imbriqués à l’allure de villes déchaînées. Mais, surtout, il vous faudra guetter en sortant de la galerie les rideaux de fer, les tunnels noirs du métro, les bétons inaccessibles, les dessous d’escalators pour dénicher d’autres œuvres de SAEIO, qui dans leur « habitat naturel » sont plus percutantes que ses toiles.

En exposant pour son ouverture l’œuvre d’un graffeur qui fait de l’artisanat du geste l’essence même de sa pratique, la galerie P38 affiche ainsi sa volonté de sortir des sentiers battus. Anticonformiste par son espace aux angles nombreux et ses pièces en enfilade, la P38 se positionne d’emblée loin des traditionnels carrés blancs des galeristes à chaussures vernies. Dirigé par la pétillante Sandra Mezache, en duo avec Manuel Morin, le lieu invite à la déambulation, et permet ainsi d’appréhender l’œuvre non plus frontalement ou brutalement, mais de façon plus douce en apprivoisant ce que l’on voit. Le parquet grince, on glane des couleurs. Cet espace singulier et son désir revendiqué de valoriser des démarches d’artistes-artisans promettent d’agréables découvertes. Gardez donc un œil sur sa programmation, bientôt on ne parlera plus que de la P38 !

Écrit par
Elise Boutié

Infos

Adresse
Prix
Entrée libre
Heures d'ouverture
Le samedi de 14h à 20h et sur rendez-vous la semaine.
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