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On a testé pour Movember : se faire une moustache dans un barber shop

Écrit par
Karim Merikhi
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Article rédigé avec Emmanuel Chirache.

Qui dit novembre dit Movember, ou « le mois de la moustache ». Pour ceux qui ne connaissent pas encore le concept, chaque mois de novembre, les hommes du monde entier sont invités à se laisser pousser la moustache dans le but de sensibiliser les populations aux maladies masculines, notamment le cancer de la prostate, et de récolter des fonds pour la recherche. C'est la fondation australienne Movember qui a lancé l'idée en 2003, bien avant la mode du poil remise au goût du jour par les hipsters.

Et au fait, si on se mettait nous aussi à la moustache ? Ça tombe bien, Damien Bournique vient de fonder le Cigare à Moustache, un barber shop rue de la Fontaine au roi dans le 11e. Rendez-vous est pris un matin pour passer sous le coupe-chou aiguisé du jeune barbier. On découvre un petit salon un peu caché, à la déco sobre, rehaussée par la présence de très anciens fauteuils de coiffeurs (avec un cendard dans l'accoudoir, c'est dire). « On les a trouvés sur le Bon Coin, nous indique Damien. On a eu de la chance ! » Après un café, on s'installe confortablement, la tête en arrière : impossible de se voir dans le miroir, ce sera la surprise.

A la tondeuse, Damien commence à nous défricher la barbe avec un soin du détail qui fait plaisir à voir. Il faudra plusieurs passages pour égaliser l'ensemble, après quoi c'est la moustache qui est peignée, coupée, chouchoutée. L'apposition d'une serviette chaude permet d'ouvrir les pores du visage, avant le passage du blaireau savonné, puis celui de la lame. C'est là qu'on comprend pourquoi le barbier doit être un homme de confiance : le bonhomme tient quand même une lame aiguisée devant votre gorge. La lotion vient finalement apaiser le feu du rasoir. Au final, on se découvre un nouveau visage, quelque part entre Tom Selleck et un poilu de 14-18. Maintenant, petit jeu : est-ce que vos proches vont remarquer la différence ? Pas sûr.  

Time Out Paris : Damien, tu es artisan barbier, un métier plutôt vintage. Comment devient-on barbier aujourd'hui ?

Damien : J'ai fait une formation classique de coiffure dans le Limousin, mais j'avais 15 ans et j'étais entouré de filles de 19 ans, ce n'était pas évident de se faire une place. Du coup, je suis monté à Paris et je suis allé voir le salon très réputé des Mauvais Garçons, au culot. Ils m'ont pris et m'ont formé sur le tas. La première fois que j'ai rasé un type, j'y ai passé 2 heures, alors qu'aujourd'hui je le ferais en 20 minutes ! J'avais vraiment peur de le couper, pourtant on utilise le coupe-chou d'une façon telle que ce serait difficile d'entailler la peau. Ensuite, j’ai travaillé à la Barbière de Paris pour expérimenter une autre approche de ce métier. Chaque salon travaille différemment, le but était vraiment que ce monde n’ait plus de secret pour moi.

On peut dire que c’est une passion pour toi ?

Oui, ce n'était pas un choix par défaut, je me suis vraiment lancé par passion. Il vous suffit de regarder nos bras à Paul (également barbier au Cigare à Moustache) et moi. On a littéralement le métier dans la peau. Le tatouage sur le bras de Paul, c’est un barber’s pole, ça représente une enseigne de barbier. C’était à ce logo qu’on reconnaissant un barbier dans la rue à l’époque, on en voit d'ailleurs de nouveau dans les vitrines de certains barbiers. C'est surtout pour flamber, quand même.

"Barber's pole" pour Paul. Peigne et ciseaux pour Damien.

On voit de plus en plus de barbiers à Paris. Pour toi, c’est juste une mode ou quelque chose qui va durer dans le temps ?

De toute évidence, il y un côté mode, mais je pense que ça va bien plus loin que ça, les hommes prennent de plus en plus soin d’eux, et forcément ils sont attirés par les endroits qui leurs sont entièrement dédiés. Ici, on vient prendre soin de soi, comme une petite parenthèse de tranquillité dans une journée fatigante. Les hommes ont eux aussi envie de prendre soin de leur apparence, de cultiver des petits trucs à eux.

Qu’est-ce qu’on va trouver chez le barbier qu’on ne trouvera pas chez le coiffeur traditionnel ?

Venir chez son barbier, c’est un peu comme passer voir un pote [nous le constaterons vite, car la plupart des clients claquent la bise à Damien en arrivant, nda]. On discute, on prend le café, et surtout on prend notre temps. Les mecs s’y retrouvent peut-être un peu plus que dans un salon traditionnel où on va avoir tendance à privilégier la coiffure féminine. Pour un coiffeur mixte, les hommes ne sont pas rentables, du coup vous allez être expédié, on ne prendra pas le temps de chiader votre nuque, par exemple. On vous fera le strict minimum, une coupe qui colle au contour de votre crâne. Mais un crâne, ça n'est pas droit ! Ici, on va plutôt vous modeler, vous redessiner comme un architecte.

Au salon, est-ce que vous êtes sensibles au mouvement de Movember ?

Totalement. D'ailleurs, je me suis taillé la moustache hier ! Enfin bon, j'ai vu ma belle-mère hier et elle ne s'en est pas aperçue... En tout cas, on se sent impliqués avec Paul. On parle encore trop rarement des maladies masculines, c’est une bonne chose de sensibiliser les gens à ça. On participe à des événements qui soutiennent cette cause régulièrement et on offre 20 % de nos prestations à l’association pendant tout le mois de novembre. Parce que porter la moustache, c'est sympa, mais il ne faut pas oublier l'essentiel : envoyer des dons à l'association Movember. En général, les gens ont un peu la flemme de se lancer dans la démarche, alors on le fait à leur place quand ils nous payent. Il suffit de regarder les chiffres sur le site Internet. En France, au niveau des inscriptions, on est en très bonne position, mais dès que l’on regarde les dons effectués, là c’est moyen. Sur 21 nations, on n’est pas dans les 10 premiers.

Un conseil pour entretenir sa moustache à ceux qui veulent soutenir Movember ?

Couper les poils de manière à ce qu’ils ne dépassent pas sur les lèvres. Un coup de peigne et de la cire pour donner la forme souhaitée et éviter les poils rebelles. Ne pas hésiter à travailler la moustache durant la journée, parce que l'effet de la cire peut s'estomper. C'est pour ça que les gens qui portent la moustache se la tripotent toute la journée, c'est pour qu'elle conserve sa forme !

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