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Filmer la guerre : les Soviétiques face à la Shoah (1941-1946)

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4 sur 5 étoiles

Dès 1942, les Soviétiques sont les premiers à contre-attaquer. Ils rognent les territoires du IIIe Reich, reconquièrent l'ouest de la Russie, les pays baltes, la Pologne, avant d’atteindre l'Allemagne en 1944. De fait, ils sont aussi les premiers à découvrir les massacres de civils perpétrés par le nazisme, à rencontrer témoins et survivants, à relever les traces des exécutions de masse (Babi Yar, Kertch) et à pénétrer dans les camps d'extermination, notamment Auschwitz. Des dizaines d'opérateurs, caméra au poing, documentent ces sinistres découvertes.

Tout l'intérêt de l'exposition didactique et très précise du Mémorial de la Shoah tient justement sur la manière dont ont été capturées, traitées puis exploitées ces images. Evidemment, en période de conflit, et particulièrement dans l'URSS de Staline qui avait débuté la Seconde Guerre mondiale dans l'autre camp, ces films ne sont pas diffusés tels quels. Soumis à un strict contrôle politique, ils vont principalement servir à la propagande (« Venge-toi ! », assènent les affiches aux citoyens russes confrontés à ces images terribles), pour encourager les Alliés à ouvrir un nouveau front à l'Ouest en leur dévoilant la barbarie du régime nazi, et pour alimenter une commission d'enquête créée dès 1942.

Entre témoignages larmoyants, destinés à cultiver l'émotion, et descriptions froides de la mécanique des usines de mort nazies, utilisées lors des procès d’après-guerre, les centaines de bobines réalisées changent de ton selon l'objectif ou la période. Il faut d'abord rendre compte d'une violence invisible (puisque dans un premier temps les preuves sont détruites par les nazis avant leur retraite), puis, à l'inverse, à partir de 1944, documenter une horreur incommensurable : celle des camps. Surtout, il faut souder l'URSS et, déjà, penser à l'après  d'ailleurs, dans les années 1960, en pleine Guerre froide, les images de 1944 seront à nouveau exploitées. Alors le pouvoir stalinien n'hésite pas à minimiser le caractère anti-juif de la violence nazie, en n’évoquant que les victimes soviétiques du IIIe Reich, pour universaliser leur martyr. Les Russes en viendront même à travestir la réalité, en faisant parfois passer les exactions de l'armée russe pour des exactions nazies, comme ce fut le cas à Katyn (Pologne). Une exposition passionnante sur la construction d'un imaginaire collectif, et l'écriture, « en direct », d'une Histoire officielle.

> Horaires : tous les jours, sauf le samedi, de 10h à 18h ; nocturne le jeudi jusqu'à 22h.

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Entrée libre
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