Gogol avait son 'Nez', Isabelle Fruchart a son oreille. Récit intimiste mis en scène par Zabou Breitman, ‘Journal de ma nouvelle oreille’ raconte en un seul-en-scène plein d’émotion et d’humour l’histoire personnelle de l’actrice. Alors qu’elle n’a que 14 ans, Isabelle perd subitement 70 % d’audition à chaque oreille, un événement qu’elle cache (et se refuse à admettre en passant), usant de mille stratagèmes pendant plus de dix ans. A 24 ans, diagnostiquée sur le tard, elle se décide de s’accommoder d’un appareillage.
A la fois interprète, auteur et personnage, Isabelle Fruchart insuffle sur scène une énergie souriante, presque antidépressive. Entourée d’un décor « vivant » composé de murs tapissés de feuilles et d’une petite mallette magique, elle raconte à la manière d’un journal les folles aventures de ses oreilles, de « sa nouvelle oreille ». Avec elle, on assiste aux premiers essais, aux différents paliers, à la redécouverte de sons, de bruits, de voix… Avec simplicité et dérision, grâce à une mise en scène sobre et poétique, elle retrace à la fois son expérience, mais nous invite aussi à redécouvrir le monde. Ceux qui ont toujours entendu, n’écoute pas de la même manière. Ensemble pendant une heure et demie, Isabelle nous propose de réapprendre à tendre l’oreille, à apprécier le bruit de l’eau pendant la vaisselle, le son que fait sa propre voix lorsqu’elle éclate dans le silence... La présence solaire d’Isabelle Fruchart et la scénographie ludique de Zabou Breitman font de ce spectacle un joli moment de théâtre. Malgré le caractère parfois un brin anecdotique et les baisses de rythme ici et là, le spectateur est emballé, et il applaudit à tout rompre.