« Enterrer les morts et réparer les vivants. » Dans le roman de Maylis de Kerangal, les mots de Tchekhov résonnent et éclairent le drame avec justesse. Ceux qui ont lu le livre garderont d’ailleurs longtemps le souvenir ému de cette histoire de transplantation d’organes. Un roman couronné de succès et une pièce de théâtre tout aussi plébiscitée.
Il était une fois un coeur
Lorsque Emmanuel Noblet présente sa mise en scène de ‘Réparer les vivants’ à Avignon en 2015, ce sont de longues files d’attente qui se dessinent devant le théâtre de la Condition des soies. Sur la scène du Rond-Point, le seul-en-scène attire toujours autant les articles de presse et les amateurs de théâtre ; à raison puisque l’adaptation scénique est une performance à elle seule.
Dans un plateau baigné dans l’obscurité, Emmanuel Noblet incarne tour à tour les protagonistes du drame. Il teste l’équilibre fragile de Simon sur sa planche de surf, se presse dans les couloirs de l’hôpital et accompagne les palpitations de Cherbourg à Paris. Le texte est découpé, disséqué et réduit à 1h20 de spectacle, mais la mœlle est intacte.
Palpitant
Il faut dire que la performance d’acteur est inoubliable. Porté par une mise en scène et une scénographie réduites à l’essentiel, Emmanuel Noblet restitue avec ce qu’il faut d’humilité et d’humanité la tragédie racontée par Maylis de Kerangal.
Et pour que le tissu narratif résiste aux différentes voix (dont celle de l’auteur elle-même) qui prennent parole tout au long du roman, Emmanuel Noblet a enrichi sa mise en scène de voix off. Et c’est peut-être ici, que le spectacle pèche, un tout petit peu et s’il faut être difficile. Parfois dissonantes, elles nous mettent à distance. Résultat ? On ressort pas chamboulé de la pièce de Noblet comme après la lecture du roman, mais est-ce vraiment grave ?