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21 nuits avec Pattie

  • Cinéma
  • 4 sur 5 étoiles
  • Recommandé
21 nuits avec pattie
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Au fond, il n’y a pas trente-six façons d’aborder la sexualité au cinéma. Ou bien on la montre – à la manière, plutôt suggestive et hors-champ, des Contes immoraux de Walerian Borowczyk, ou de façon nettement plus frontale (à l’image de cette fameuse éjaculation faciale en 3D du dernier Gaspar Noé). Ou alors, deuxième possibilité, on en discute, on en parle, en passant par le langage comme médiateur du désir ; et là, ça peut aller de Jean Eustache à Harmony Korine.

C’est cette seconde piste – plus subtilement orale – que suit ce film des frères Larrieu, 21 nuits avec Pattie, qui s’affirme comme l’une des propositions les plus solides et enthousiasmantes du duo de cinéastes. Où la « Pattie » du titre, incarnée par une réjouissante Karin Viard, discourt sur sa vie sexuelle à longueur de temps avec une truculence, une gourmandise et un goût du verbe qui la font osciller entre féminisme couillu (parler crûment de sexe et de plaisir féminin, sans pincettes ni métaphores) et jeu permanent de la libido – que ce soit par sa sensualité brute ou par sa parole libre.

Ce premier aspect du film, qui consiste grosso modo à envisager l’omniprésence de la sexualité à travers le jaillissement jubilatoire des dialogues, constitue sans doute son charme le plus évident. Seulement, il faut préciser que 21 nuits avec Pattie joue sur plusieurs niveaux de narration ; le personnage de Karin Viard, bien que mémorable, n’étant pas tant au centre du long métrage que celui de Caroline (Isabelle Carré), jeune Parisienne débarquée dans un bled du sud de la France pour venir y chercher le corps de sa mère décédée.

Ancienne avocate qui n’avait manifestement pas froid aux yeux (ni au reste), que sa fille a perdue de vue depuis longtemps, cette mère disparaît bientôt. Mais au sens propre, cette fois-ci : son cadavre s’évanouissant subitement dans la nature, laissant imaginer aux flics du coin la présence d’un nécrophile fétichiste rôdant alentour. A mesure que le mystère s’épaissit, d’autres personnages entrent également en scène, à commencer par un ancien ami de la défunte, Jean (André Dussollier), que Caroline prendra pour J.M.G. Le Clezio désirant rester incognito.

Humour noir et absurde, suspense au second degré, beauté des paysages : servi par un impeccable défilé d’acteurs, 21 nuits avec Pattie lance des pistes en érotisant tous azimuts le genre du polar. Le résultat est ludique, frais, sensuel, à la fois provocant et délicat. Comme souvent avec les frères Larrieu, certes. Mais rarement la tonalité de leurs films (Peindre ou faire l’amour, L’Amour est un crime parfait…) avait paru aussi cohérente et joyeuse. Bref, autant dire que, là, c’est exactement ce dont on avait besoin.

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