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Après Mai

  • Cinéma
  • 4 sur 5 étoiles
  • Recommandé
Après mai
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Des films sur Mai 68, il y en a eu pas mal. Le catalogue de MK2 en regorge. Mais surtout, le célébrissime mois des pavés volants et des coups de matraque dans la gueule est devenu un authentique marronnier médiatique, et une tarte à la crème bien épaisse de l’imagerie contestataire – carte postale estudianto-hippie, tee-shirt Che Guevara... Bref, pas facile, a priori, d’aborder cette période pour le nouveau film d’Olivier Assayas. Pour peu, on craindrait presque de régurgiter un mp3 d’Hendrix.

Heureusement, ‘Après mai’ commence par un mélange assez prenant de dynamisme et de fluidité, avec une scène de répression policière qui restera à peu près sa seule séquence à connotation véritablement historique ou sociétale. Ce qui n’est pas plus mal. Bien sûr, en suivant l’histoire d’un groupe d’étudiants – parmi lesquels un jeune homme qui écoute Syd Barrett, s’intéresse au cinéma et qu’on soupçonne fortement d’être une version antoinedoinelisée d’Assayas –, et en assistant à leur éveil à l’art, aux sens, aux drogues ou à la contestation politique, le film ne peut manquer d’évoquer d'inévitables clichés. Encore que ceux-ci restent en l'occurrence plutôt accueillants : une jolie hippie aux seins rieurs et nus comme une évidence, un débat houleux sur la politique du cinéma, une soirée défonce à la campagne sur fond de Captain Beefheart…

Mais enfin, tout cela semble finalement secondaire, lorsqu’on considère la tonalité peu à peu installée par le film, sur l'ensemble de sa durée : à la fois bienveillante et sans complaisance (ni nostalgie), où de jeunes gens se retrouvent face à des choix de vie qu’ils ne savent comment prendre – ou qui aimeraient choisir de ne pas choisir. Du coup, il ne se passe pas nécessairement grand-chose, et le film se tient soigneusement à distance de tout message définitif sur Mai 68 et ce qui tourne autour. Pourtant, le récit se construit habilement sur des fragments de narrations, des micro-évènements (une bagarre, un type qui se fait virer du lycée, une fuite, un flirt) comme s’il n’y avait pas véritablement de thème principal ; seulement un ensemble de variations, d’échos. C’est assez fin, léger. Evidemment, il y en aura toujours pour préférer la vision post-68 d’un Klapisch (‘Le Péril jeune’, en mode potache) ou d’un Garrel (le romantisme noir et blanc des ‘Amants réguliers’). Mais au fond, ‘Après mai’ est sans doute l’un des premiers films à nous livrer une version apaisée de l’époque, nous la rendant moins mythique, fumeuse ou écrasante. Et, au final, plus proche et familière. La vie secrète des jeunes, mais sans iPhone.

Écrit par Alexandre Prouvèze
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