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Fils de

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Fils de - HPG
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Quel que soit le genre dans lequel il se lance, Hervé-Pierre Gustave reste HPG, dur et fantasque égocentrique au parler cru. Figure tutélaire du porno des années 1990, aventureux réalisateur d'œuvres non-licencieuses telles que 'Les Mouvements du Bassin' ou 'On ne devrait pas exister', l'ancien hardeur a choisi pour ce nouvel essai filmique de camper son habituel personnage, dans un documentaire auto-fictionnel aussi drôle sur la forme que surprenant par son fond.

Loin de chercher à relater la vie et le quotidien d'un pornographe, le réalisateur français s'amuse, tel Audiard dans ‘La Nuit, Le Jour et toutes les Autres Nuits’, à suivre les pérégrinations d’un forban parisien, à montrer les doutes et faiblesses liées à sa paternité, dans un registre qui tire plus volontiers sur le comique singulier de l’américain Louis C.K que sur une érectile biographie de Rocco Siffredi. Le genre rappelle également la récente série écrite et jouée par Éric Judor, ‘Platane’, où la moitié de l'ancien duo Eric & Ramzy fictionnise des éléments de sa vie pour mieux créer un personnage ni tout à fait lui-même, ni tout à fait un autre. HPG, à l’instar de l’acteur fétiche de Quentin Dupieux, n’hésite pas se mettre à nu, à montrer de lui-même le pire sans retenue aucune, et son criant ridicule à l’écran se pare d’un pathétique à faire passer Laurel et Hardy pour d'habiles funambules.

Dès les premières secondes, l’histoire de ce faux documentaire montre un HPG couard, refusant d’assumer un tournage qu’il décide de faire avorter, renvoyant systématiquement dans les cordes femmes, amis et producteurs. Grand déballage de torts et de vices chez ce personnage qui ne se laisse que peu de répit et de crédit, si ce n’est une verve pleine de jolis mots et d’hapax cinématopornographiques tels que « raccord-bite », ‘Fils De’ ne manque pas d’humour et de piquant. Les apparitions soudaines de l’actrice Nina Roberts ou du chanteur Christophe, les cinq minutes de mime musical auquel s’adonne dans son propre appartement celui qui signera également la bande son du film, constituent autant de moments remarquables et profonds.

Profond, le film ne manque en effet pas de l’être. De cette exposition pitoyable d’un être à terre s’infligeant à lui-même son propre tabassage, HPG adopte sans le vouloir un discours sur la pornographie comparable à celui que tenait Kechiche sur le sexe lors de la sortie de ‘La Vie d’Adèle’ : pourquoi donc cacher une pratique si intrinsèquement partagée ? ‘Fils De’ ne manque pas d’aborder des sujets comme l’attrait pour des pratiques et goûts singuliers, avec un parlé franc et une absence totale de jugement, conciliant Mocky et le réalisateur franco-tunisien récemment primé à Cannes, et prouvant au passage qu'une réflexion partie de sous la ceinture ne vaut pas moins qu'une longue logorrhée.

Écrit par Yves Czerczuk
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