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Guerrière

  • Cinéma
  • 4 sur 5 étoiles
  • Recommandé
Guerrière
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Malgré son thème franchement peu avenant, le premier long métrage de David Wnendt fait, au final, étonnamment mouche. Le film suit Marisa (Alina Levshin), jeune skinhead dans une petite ville paumée de l’Allemagne d’aujourd’hui. Petite-fille de SS, le corps tatoué de croix gammées, Marisa couche avec son chef de bande (énorme barbare dont elle désire un enfant), casse la gueule aux touristes, crie « Heil Hitler » à tout bout de champ, écoute du rock raciste et travaille, parfois, dans la supérette tenue par sa mère. Ambiance.

Autant dire, on craint un peu que ça se passe comme ça pendant tout le film – les beuveries entre néo-nazis n’étant évidemment pas notre tasse de thé.  Heureusement, deux évènements vont venir perturber ce quotidien ultra violent : d’abord l’arrivée d’un gamin, réfugié afghan, Rasul (Sayed Ahmad Wasil Mrowat), que Marina prend d’abord comme cible mais qui lui tiendra bientôt tête et la remettra en question. Puis, l’intégration dans son groupe d’une adolescente de 15 ans, Svenja (Jella Haase), qui lui rappelle comment elle-même avait basculé dans l’extrémisme.

Et c’est ce dernier aspect qui paraît le plus profond dans ‘Guerrière’ : ou comment la dérive d’un individu vers l’extrême-droite ne relève pas d’une pensée, d’un choix délibéré, mais d’un mélange instable de désœuvrement, d’absence de perspective, d’humiliation et de colère, qui ne trouvent que l’ultra-violence comme exutoire. Sans jamais devenir complaisant avec ses personnages, le film parvient ainsi à rendre palpable que la haine ne naît pas d’elle-même et représente avant tout le fruit d’une frustration politique et sociale. Ce qui, au final, représente aussi un thème contemporain. Or, la bonne idée de David Wnendt, c’est ici d’avoir féminisé ce basculement dans la violence – à travers, d’ailleurs, deux actrices impeccables.

Au bout du compte, avec sa mise en scène assez sèche et la tension sourde qui le parcourt, ‘Guerrière’ se range naturellement entre le récent ‘Lore’ de Cate Shortland, ‘La Vie de Jésus’ de Bruno Dumont et une version actualisée du ‘Ruban blanc’ de Michael Haneke. Bref, un film rude, mais fort. Et très certainement un réalisateur à suivre.

Écrit par AP
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