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Le Président

  • Cinéma
  • 4 sur 5 étoiles
  • Recommandé
Le Président - Mohsen Makhmalbaf
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Le Printemps arabe a beau avoir secoué l’actualité mondiale en 2011, il lui aura fallu quatre ans pour remuer à son tour celui du cinéma. Car, hormis quelques documentaires plus ou moins intéressants (du récent ‘Eau argentée’ au terrible ‘Le Serment de Tobrouk’ de Bernard-Henri Lévy) et un joli film satellite (‘C’est eux les chiens…’), les évènements de la place Tahrir ou de l’avenue Habib-Bourguiba n’avaient, jusqu’à la sortie du ‘Président’ de Makhmalbaf, inspiré aucun réalisateur malgré l’immensité du sujet. Grand bien en a finalement pris à la caste des cinéastes de laisser ainsi l’Iranien dégainer sa caméra le premier. Personne d’autre que cet Iranien exilé ayant connu la guerre entre l’Iran et l’Irak et la révolution de 1979 n’aurait pu livrer un tel point de vu si humain sur la chute d‘un régime dictatorial.

‘Le Président’, outre son esthétique et ses paysages irréprochables, offre le point de vue inhabituel d’un dictateur fuyant la vindicte populaire en compagnie de son petit-fils de 5 ans. Tentant de rejoindre la mer en compagnie du vieillissant tyran, l'enfant se retrouve confronté à la souffrance que le président a infligé à son peuple et, maintenant qu’ils sont tous deux personæ non grata, qu’il inflige bien involontairement à son innocent petit-fils. Un personnage symbole de la complexité du cinéma de Makhmalbaf, mais aussi des rapports humains en temps de guerre, lui l’enfant dont le seul tort est d’être né d’un despote, poursuivi par une population enragée prête à tout pour obtenir réparation.

Cet éclairage double, nuancé, détaché de toute passion, le réalisateur l'explique par son histoire personnelle. Pratiquement apatride, Makhmalbaf est en effet devenu un homme sans attache, et que l’on sent, par cette histoire qu’il aura mis pratiquement dix ans à écrire, dégouté de la violence et des spirales infernales que connaissent les Etats en période de troubles. Volontairement universaliste par sa bande-son, ses paysages et cette situation que l'on semble avoir déjà vue sur tous les continents, ‘Le Président’ représente un pays qui pourrait en être mille autre avec une poésie et un dénuement que beaucoup regrettaient de ne pas trouver dans ses œuvres antérieures, et plus particulièrement les plus difficiles ‘Kandahar’ ou 'Le Silence'. Une nouvelle claque que nous assène Makhmalbaf.

Écrit par Yves Czerczuk
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