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Eugène Atget

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Time Out dit

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Si vous êtes du genre à prendre la fuite devant le Paris de Robert Doisneau, lisse comme une dragée de première communion (et auquel l'Hôtel de Ville consacrait une exposition jusqu’au 28 avril), vous trouverez sans doute un refuge réconfortant auprès de la ville ébouriffée saisie par l'objectif d'Eugène Atget. Bien avant les cartes postales sauce humaniste, supplément guimauve, le célèbre photographe girondin avait écumé les rues de la capitale entre 1898 et 1924, signant des centaines de prises de vue aussi éraillées qu’un vieil accordéon. A mille lieues des cancans, du Charleston et d'une Belle Epoque aux cheveux gominés, le Paris d'Atget, peuplé de vendeurs ambulants et de devantures éventrées, constitue un fonds documentaire inestimable. Ruelles bardées d’affiches, édifices en voie de démolition, ghettos, guinguettes, ponts, parcs, statues… Des beaux quartiers aux faubourgs brinquebalants, des ambassades aux piaules d’ouvriers, chaque mur, chaque personnage, chaque pavé a droit de cité dans cette collection de 230 tirages que dévoile le musée Carnavalet. Une mine d’or couleur sépia qui nous téléporte aux débuts du XXe siècle, quelque part entre l’‘Assommoir’ d’Emile Zola et le New York de Berenice Abbott, célèbre photographe de la Grosse Pomme des années 1930, qui vouait une admiration sans bornes aux paysages urbains d’Atget.

Une admiration que partageait aussi Man Ray (dont Abbott fut l’assistante – le monde est petit), fidèle client du photographe français. C’est d’ailleurs à l’illustre surréaliste que l’on doit le clou de cette exposition : un ensemble de 43 tirages issus de la collection de Ray. On y découvre un regard plus récalcitrant, marqué par les premiers balbutiements d’une vision d’avant-garde ; un Atget dont l’œil, moderne, se pose sur les corps nus de prostitués, les mannequins de vitrines ou les « grandes » roues de fêtes foraines, constellées de petites montgolfières en bois. On y explore un Paris plus scabreux, jalonné de bidonvilles, de maisons closes et de petites gens, et prêt à figurer en couverture de la Révolution surréaliste de 1926 : Atget accepta la reproduction de sa photo de l’éclipse de 1912 dans la revue d’André Breton à condition que son nom n’y figure. Reporter jusqu’aux os, il ne considérait pas ses photographies comme des œuvres d’art mais comme des documents historiques, comme une topographie vouée à préserver la mémoire d’une ville en pleine mutation. Une ville-fantôme, où les passants, volatilisés, se diluent au fond de flous spectraux, la rapidité de leurs mouvements échappant à l’objectif boulimique d’Atget. Brut et franc.

A lire aussi :

> Notre article sur l'exposition de Berenice Abbott au Jeu de Paume, février 2012

Infos

Site Web de l'événement
carnavalet.paris.fr/fr/expositions
Adresse
Prix
7 €
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