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Vidéo vintage

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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Du papier peint sauce sixties, de gros tapis aux poils hérissés, des abat-jours à franges et des tas de fauteuils moelleux façon Charles Eames, éparpillés dans deux espaces concomitants. Ah, on se sent si bien en arrivant à la galerie du musée, transformée en quatorze mini-salons au design rétro-douillet, qu’on aurait bien apporté son doudou pour s’assurer un confort optimisé.

Parce que la visite risque d’être longue : plus de 18 heures de bandes tournent en boucle sur les « petits » écrans (comprendre grosses boîtes noires carrées tout droit sorties de 1980) de ‘Vidéo vintage’, débobinant de remarquables séquences filmées entre 1963 et 1983. Autant dire qu’à moins d'avoir trois jours devant soi et un excellent antidote contre les crises d'épilepsie, il faudra se résoudre à ne pas voir cet hommage kaléidoscopique à l’histoire de l’art télévisuel dans son intégralité : chacun, selon son endurance et les bribes qu’il saisira ici et là, verra une exposition un peu différente de celle des autres « téléspectateurs » du Centre Pompidou.

Bruce Nauman, Nam June Paik, Samuel Beckett, Marina Abramovic, Valie Export… Autant de monstres sacrés dont les trésors ont été excavés parmi les fossiles des collections beaubourgeoises. Ils nous livrent tour à tour des performances anxiogènes au goût de soutien-gorge brûlé, de l’engagement au parfum de Nouvelle Vague ou des lubies psychédéliques sculptées dans la lueur granuleuse du Portapak (la première caméra à être démocratisée pendant les années 1960). Les tendances se dessinent et se croisent comme dans un magasin d’électronique, bourré d’écrans de tailles différentes qui fusent en tous sens. Dans un premier temps, le combat politique, le féminisme outrancier et l’autofilmage masochiste dominent, comme si la vidéo était arrivée telle une arme sur le champ de bataille de l’art, pour lutter contre le statu quo. Puis, vers la fin des années 1970, les discours prennent des couleurs, de la distance et parfois même un peu d’humour, pour aller interroger davantage les médias et leur surconsommation.

Sujet passionnant, casting de rêve, chefs-d’œuvre à foison, explications fouillées pour accompagner chacune des soixante-dix pièces (lecture vivement recommandée) : tous les ingrédients étaient réunis pour faire de ‘Vidéo vintage’ une réussite, sorte d’entrée officielle de la genèse-vidéo dans l’histoire de l’art. Et pourtant, on en sort frustré. Panorama plus qu’analyse approfondie des vingt premières années du video art, l’expo, au vu de son thème presque impossible à mettre en scène (sans compter le fait que seuls un ou deux casques sont reliés aux télévisions, ce qui crée des embouteillages), ne peut être que survolée.

On peut, par exemple s’offrir un aperçu des performances courtes et engagées de Chris Burden (qui se fait tirer une balle dans le bras) ou de Martha Rosler (qui fait une démonstration d’ustensiles de cuisine comme s’il s’agissait d’armes), et poursuivre avec ‘Video : the New Wave’, documentaire de Fred Barzyk et WGBH sur le video art, en guise d’introduction consistante. Il serait dommage aussi de passer à côté de l’excellent ‘Maso et Miso vont en bateau’ de Carole Roussopoulos, Nadja Ringart, Delphine Seyrig et Iona Wieder, hilarante mais consternante parodie d’une émission (sur la) misogyn(i)e avec Bernard Pivot et Françoise Giroud, alors première secrétaire d’Etat à la condition féminine. Ou bien, sur un autre ton, s’offrir les ‘Nanas’ de Jean-Luc Godard ou les ‘Bum’ de Les Levine, deux excellents documentaires prêtant la voix à ceux qui ne l’ont que rarement. Bref, à chacun de papillonner à sa guise d’écran en écran pour tirer le meilleur de cette exposition, imparfaite mais louable, à laquelle on se rendrait rien que pour le plaisir de se faire cracher au bec par Paul McCarthy. Ou de se faire pointer du doigt, pendant 23 minutes, par un Vito Acconci atrabilaire.

Infos

Site Web de l'événement
www.centrepompidou.fr
Adresse
Prix
De 9 à 13 €
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