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Philippe Katerine : Comme un ananas

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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Etre de gauche et le rester, c’est pas facile tous les jours. Surtout quand on s’appelle Philippe Katerine. L’enfance conservatrice en Vendée, la raie de côté, le cardigan, l’appartement dans le 16e arrondissement, la reprise de ‘A la queuleuleu’… En y réfléchissant bien, tout prédestinait le chanteur-compositeur-de-pop-électro-acteur-plasticien-poète à voir la vie en bleu UMP. Et ça, ça le rend un peu parano.

Solution : l’exorcisme. Oui, dans ces moments-là, Philippe préfère adjurer le « Katerine de droite » qui sommeille en lui, ancien élève des Beaux-Arts de Rennes. En montant, par exemple, sa tout première exposition dans la galerie d’art contemporain des galeries Lafayette. Sous la coupole du boulevard Haussmann. A deux pas des sacs Prada et des chocolats Pierre Hermé. En pleine période électorale.

Du grand n’importe quoi ? Oui, un peu. Et c’est là tout le plaisir idiot que procure cette expo farfelue, absurde et poétique - à l’image de son créateur. Katerine signe un parcours à prendre au vingt-troisième degré, au fil duquel on croise Nicolas Sarkozy qui ratisse des feuilles mortes en pensant à la forme des nuages ou François Fillon qui songe au cochonnet et à la solitude, en jouant à la pétanque. Scrupuleusement esquissées au crayon à papier, les silhouettes des politiques deviennent humaines, candides, gentiment ridicules. Elles apparaissent et disparaissent sous forme de diptyches énigmatiques : d’un côté, Dominique de Villepin debout devant le ‘Cri’ de Munch ; de l’autre, le ‘Cri’ tout court. D’un côté, Marine Le Pen sur un « Pèse-personne » ; de l’autre, un pèse-personne tout court. Et ainsi de suite. Comme pour voir comment ça ferait si ces personnages s’éclipsaient soudainement du paysage. Ni vus ni connus.

Puis, c’est le bouquet. Une immense sculpture aux couleurs épileptiques s’élève dans un bassin d’eau, comme une fontaine onirique à la gloire des balles de tennis ou un monument à Kanye West, qui trône en son centre. S’ensuivent des hommes-ananas gribouillés sur des post-its et des paysages glauques du 16e peints à l’aquarelle : quartier dans lequel Katerine se sent comme un… ananas hors de son… panier de fruits.

Bref, l’ensemble défile comme une histoire sans queue ni tête, imbibée de l’esprit loufoque d’un artiste qu’on avait surtout l’habitude de côtoyer en musique. En images, Katerine c’est presque pareil : il dessine « faussement faux » comme il peut chanter, parfois, « faussement faux », délibérément. Trait benêt ou voix nasillarde et gouailleuse : même combat. Si le résultat est moins puissant (on « préfère » largement sa Marine le Pen chantée – dans ‘Le 20.04.2005’ - que crayonnée sur papier),on retrouve-là toute la grisante schizophrénie d’un artiste pluridisciplinaire, capable de chanter ‘Jésus Christ’ ou la ‘Reine d’Angleterre’ aussi bien que ‘Ma Benz’ de NTM. Et de partager sans complexes ses rêves bleus-UMP. Ou ses cauchemars, selon le point de vue.

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