Dans la tête de Redouanne Harjane

Devant le Jamel Comedy Club, la queue s’allonge. Tickets imprimés en main, les spectateurs attendent impatients et frigorifiés par le vent de décembre. Et comme toujours lorsque le placement est libre, on s’amoncèle sans pitié devant la porte d’entrée. Quand trente minutes de retard plus tard elle s’ouvre, c’est donc un flot pressé qui se dirige vers l’intérieur. Eclairée par des lustres, parsemée de tables rondes et de banquettes carmin, la salle du théâtre ne manque pas de convivialité. D’ailleurs, en cas d’affluence, sachez que vous serez bien serrés les uns aux autres. Encore quelques courtes minutes d’attente, et voilà que Redouanne Harjane traverse la foule. Feutre noir enfoncé jusqu’aux yeux et costume de dandy cool, il s’installe sur une scène déjà peuplée d’un piano et d’une guitare. L’homme à la voix de velours est musicien, qu’on se le dise. Ses spectacles ne ressemblent à rien de ce que l’on a pu voir ailleurs. Genre hybride entre le spectacle musical et le stand-up, ‘Dans la tête de Redouanne Harjane’ mixe chansons, aphorismes absurdes et cynisme déconcertant. Voire très déconcertant. Car il faut bien le dire, ses blagues à grand renfort de provocation ne sont pas toujours réussies. « Des fois, quand je suis énervé, je jette des côtes de porc sur les musulmans. » Tantôt hilare, tantôt impassible, la salle peine à se mettre d’accord. Au grand dam du comédien qui essaye de son côté de la rampe de chauffer son public : « On vous a violé avant de venir ou quoi ? » Ouch. Ni très drôles (« J’ai un copain claustrophobe, quand il cligne des yeux, il s’évanouit »), ni même de bon goût (« J’ai un pote qui a un sperme tellement puissant que quand sa femme a accouché, son enfant était déjà enceinte »), les vannes du Messin laissent parfois bien perplexe. Eh oui, « on peut rire de tout, mais pas avec tout le monde » comme disait Desproges.