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Un captif amoureux

  • Théâtre
  • 3 sur 5 étoiles
  • Recommandé
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Après avoir adapté ‘Les Bonnes’ en 2011, Guillaume Clayssen revient à l’Etoile du Nord avec une nouvelle mise en scène d’après Jean Genet, tirée cette fois-ci de son recueil posthume ‘Un captif amoureux’, publié chez Gallimard en 1986. Un texte relativement méconnu, dont on ne soupçonnait pas l’impressionnante densité, où Genet relate son expérience auprès du peuple palestinien au cours des années 1970 et 80, à mi-chemin entre poésie, journal intime et reportage de guerre.

Politiques dans leur propos autant qu’à travers leur écriture, les extraits sélectionnés pour cette adaptation scénique révèlent chez Genet l’exercice d’une implacable lucidité, interrogeant son rapport à l’Autre, sa place d’homme dans le monde, avec une énergie qui dépasse de loin le militantisme ou les bonnes intentions humanistes. Car le regard du poète, alors âgé de plus de 60 ans, n’esquive aucunement les questions qui fâchent : au contraire, il les creuse, les mastique, les recrache dans une langue à la fois réflexive et révoltée.

Or, pour mettre en scène un texte aussi âpre et exigeant, on imaginait mal une débauche d’effets à la Vincent Macaigne. Les mots de Genet restent ici au centre du plateau, hantant l’espace avec leur profondeur, leur éclat, leur détresse, tandis que deux comédiens, seuls en scène, leur servent de porte-voix. D’un côté, Benoît Plouzen-Morvan, avec ses airs de Genet jeune, sert de double au poète, alors qu’Olav Benestvedt, long corps filiforme, androgyne et décharné, incarne métaphoriquement le peuple de Palestine : ses souffrances, ses psalmodies, ses silences, sa féminité.

En parallèle, la mise en scène de Guillaume Clayssen joue avec parcimonie sur les supports audiovisuels, en particulier avec des projections de citations et de superbes photographies en noir et blanc de Raed Bawayah. Sans fioritures, le dispositif peut d’abord paraître austère. Mais l’on se retrouve tout de même bientôt emporté par la verve du texte, habilement servi par cette forme finalement humble et respectueuse. Bien sûr, ‘Un captif amoureux’ n’a rien d’un spectacle facile. Mais il n’en paraît que plus précieux, permettant de retrouver la puissance, l’ouverture, l’actualité de l’écriture et de la pensée de Jean Genet.

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