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Proust - Dire Combray

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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Michel Voïta se fait passeur de l'écriture proustienne à travers trois extraits de 'Du côté de chez Swann'.

Avec sa petite salle au rideau défraîchi, le Théâtre de la Huchette semble être figé dans le passé. Témoin de la renaissance artistique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le lieu perpétue en effet la mémoire des débuts de l'absurde en programmant depuis 56 ans les mêmes pièces : 'La Cantatrice chauve' et 'La Leçon' de Ionesco, qui y connurent à l'époque un franc succès. Mais il ouvre aussi chaque soir ses portes exiguës à d'autres auteurs, classiques et contemporains. En alternance avec un thriller théâtral d'Arnaud Denis et une comédie musicale d'après l'oeuvre de Gaston Leroux, c'est en ce moment Marcel Proust qui s'invite sur les planches du théâtre de poche, grâce à Michel Voïta qui s'en fait le passeur.

Mémoire et performance

Après plusieurs années de télévision pour la série 'R.I.S Police scientifique', le comédien suisse a décidé de revenir à ce qu'il considère comme l'essence de son métier : la transmission de textes. Avec 'Proust – Dire Combray', où il se met lui-même en scène, il nous offre un voyage à l'opposé de l'absurde. Une traversée du premier chapitre de 'Du côté de chez Swann', le premier tome de 'La Recherche', dont les longues et labyrinthiques descriptions constituent un défi pour la mémoire autant que pour le jeu. Michel Voïta le relève en toute humilité. Folio en main, vêtu de simples habits noirs, l'acteur s'efface derrière le texte qui, de son propre aveu, fut longtemps pour lui l'objet d'une « culpabilité culturelle ». Après un salut au public et quelques minutes de lecture, il prend place sur une chaise en bois, face à une table rudimentaire où repose un verre d'eau qu'il ne touchera pas avant la fin de son marathon verbal. Soit une heure plus tard.

Combray en trois temps

Durant cette heure, le comédien passe à plusieurs reprises de l'incarnation à la narration. Entre les trois extraits qu'il a sélectionnés – le début du roman, le souvenir d'une soirée d'enfance et le célèbre épisode de la madeleine –, il revient en douceur à la situation d'énonciation. Le temps par exemple de citer Roland Barthes, selon qui « ce qu'il y a de bien dans la relecture de Proust, c'est qu'on ne saute jamais les mêmes passages ». Grâce à cette distanciation, Michel Voïta dit ses limites dans l'exercice qu'il s'est choisi. Son incapacité à faire autre chose qu'une introduction à l'oeuvre monumentale de Proust. Ce qui est déjà beaucoup. Les passages qui composent 'Proust – Dire Combray' donnent en effet un bel aperçu des multiples allers et retours temporels de 'La Recherche'. De son ambition de roman total, à une époque où le fragmentaire règne en maître.

Écrit par
Anaïs Heluin

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