Recevez Time Out dans votre boite mail

Recherche

On a visité le centre culturel “expérimental” installé dans l’ancien Tati de Barbès

L’ancien bâtiment de Tati dans le 18e accueille depuis le 10 septembre un nouveau lieu éphémère : l’Union de la jeunesse internationale. Espace d’expo, radio, cantine qui se veut repaire de quartier, on s’est rendu dans ce lieu vraiment pas comme les autres.

Rémi Morvan
Écrit par
Rémi Morvan
Publicité

Depuis le 30 septembre 2021, fini les cabas et les caddies au 2 boulevard Rochechouart ! Soixante-treize ans après son ouverture, Tati, l’antre des petits prix lancé en 1948 par Jules Ouaki, tirait définitivement le rideau. Un an après, en attendant le début des travaux de la Passerelle – un complexe mêlant espace culturel, logements et restauration –, le célèbre bâtiment toisant le métro aérien s’anime d’un nouveau souffle en accueillant l’Union de la jeunesse internationale.

A la tête de cette Union, pas de syndicalistes mais une firme textile bien connue du quartier, la Maison Château Rouge (MCR). Depuis le 10 septembre et – au moins – jusqu’à la fin 2022, l’Union occupe une partie du rez-de-chaussée et du premier étage du bâtiment racheté par le promoteur Immobel, soit environ 400 mètres carrés sur les 6 500 de l’ancien magasin.

Un lieu ouvert à toutes les cultures

Ce projet pensé avec l’agence Forest trotte depuis un bail dans la tête de Youssouf Fofana et son équipe : « Tati n’était pas encore vendu qu’on y pensait déjà. Au départ, on voulait créer le Palais de Tokyo de la diaspora africaine, puis on l'a élargi à toutes les cultures diasporiques. On avait des discussions avec le maire du 18e pour faire quelque chose qui parle à la jeunesse ainsi qu’aux gens du quartier, de passage et de l’extérieur. Mais il manquait un lieu. Une fois que l’immeuble Tati s’est libéré, c’était évident, c’est ici que ça devait se faire. »

Hall Haus
©️ Véronique Huyghe

Décrit comme un « centre culturel expérimental », le lieu est aussi compact dans ses mensurations qu’audacieux dans ses propositions. « Expérimental, dans le sens où l’on fait quelque chose qui n’existe pas vraiment ailleurs, en mêlant des usages très variés au sein d’un même espace », expose Himane, coprogrammatrice du lieu. « On avait envie de rassembler tout ce qui nous inspire et qu’on aimerait voir dans notre ville, dans des domaines parfois très éloignés. Le kiosquier de la place de Clichy va par exemple autant nous inspirer qu’un lieu visité à New York. »

Le lieu est ouvert et accessible gratuitement tous les jours de 11h à 20h. Sorte d’agora, le rez-de-chaussée s’articule autour d’une grande table pensée sur le modèle des réunions internationales fondatrices type conférence de Bandung. « On voulait trouver un lieu où se réunir et discuter de nos problématiques d’aujourd’hui tout en réfléchissant au monde à construire, explique Youssouf. Étant des jeunes de cultures différentes, ça a donné l’Union de la jeunesse internationale. C’est ça la référence et le pourquoi de cette table ronde. » 

Faire venir le quartier

Autour de la table sont organisés des débats, des ateliers et des émissions de radio. On peut se poser, emprunter un bouquin à la bibli, lire un journal international ou manger un bout à la cafétéria. Une cafèt qui dit beaucoup de l’Union et de son rapport au quartier : « C’est important d’être ancré sur un territoire et d’avoir un impact direct sur les gens qui sont à trente mètres autour de nous. D’où notre sélection pour la cafétéria », explique Himane. On y trouve des produits piochés quotidiennement dans les alentours (galette algérienne, pain afghan) et des plats du Bendo, un resto de Créteil dont la carte est imaginée d’après les nationalités présentes dans l’immeuble de l’équipe.

Hall Haus
©️ Véronique Huyghe

Le premier étage est, lui, dédié aux expos, assez pointues, qui se succèdent tous les quinze jours. La prog a démarré par la fabuleuse rétrospective Pour ceux du collectif de designers Hall Haus, et enchaînera avec des expos sur l’indépendance de l’Algérie et sur la CAN du 18e.

Reste à affronter la réalité du terrain : les gens du quartier vont-ils venir ? Ou cette Union sera-t-elle circonscrite à une poignée d’initiés ? « Ce lieu est entièrement gratuit, il n’y a pas de considérations économiques mais des frontières symboliques », estime Himane, optimiste. « On a la chance d’être à Tati, où tout le monde se sentait à l’aise de venir. Notre enjeu est de ne pas perdre cet avantage-là et d’éviter que ce lieu se resserre sur des publics plus restreints. » Lors de notre passage, on y a croisé quelques familles, curieuses, un vendeur de cigarettes écoutant une table ronde et un couple pas encore au courant de la fin de Tati.  

L’expérience durera jusqu’à la fin de l’année. Mais il ne s’agit que d’un galop d’essai, dévoile Youssouf : « L’idée de ce lieu, c’est de faire une préfiguration possible pour tester l’usage, voir les réactions. Est-ce que ça plaît, est-ce que ça fonctionne ? Est-ce que les habitants du quartier ont envie de ça ? La phase de test est très importante. Notre souhait profond, c’est que l’Union pose ses valises de façon pérenne. Quoi qu’il arrive, le lieu continuera à vivre dans un autre espace du quartier, c’est obligatoire. » 

Quand ? Tous les jours, de 11h à 20h 
Où ? 
2 boulevard Rochechouart, Paris 18e
Combien ? Accès libre

Union de Jeunesse Internationale
© Union de Jeunesse Internationale

À la une

    Publicité