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Les activistes du goût : Alexia Soyeux, dénicheuse de tendances à la Grande Epicerie

Écrit par
Zazie Tavitian
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Pour une geek de l’alimentation comme moi, doublé d’une folle de nourriture, triplé d’une fan de supermarché, la Grande Epicerie du Bon Marché est un peu mon idéal ultime. Le genre d’endroit où je n’ose pas trop aller de peur d’y passer la nuit ou de me mettre à y dépenser tout mon salaire en poivre égyptien et en pâtes à l’encre de seiche… C’est aussi un lieu fascinant sociologiquement, où l’on croise des petites vieilles et des jeunes friqués qui font leurs courses tout naturellement, remplissant leurs cabas aussi bien de Nutella que de la dernière huile d’olive à la truffe et où des touristes japonais passent 45 minutes à choisir une bouteille d’eau parmi les 150 références.

C’est surtout ici que travaille Alexia Soyeux, 30 ans, occupant le poste de « chef de projets marketing et sourcing » ou, plus simplement, de dénicheuse de produits. Entretien avec la fille qui – à mon humble avis – a un des métiers les plus cool de la capitale.

Quelles études fait-on pour devenir « dénicheuse de produits » ?

J’ai toujours aimé bien manger, mais je ne pensais pas travailler un jour dans le milieu de la gastronomie. C’est pendant mon Master 1 au Celsa, quand j’ai dû choisir mon sujet de mémoire, que j’ai décidé d’écrire sur la pâtisserie de luxe. Je suis ensuite partie au Vietnam, où j’ai pris pas mal de cours de pâtisserie. J’étais de plus en plus passionnée. En rentrant, j’ai fait un stage chez CCDessert, une boîte de conseil en création de produits agroalimentaires et je me suis dit que je voulais vraiment travailler là-dedans. A la fin de mon école, je me suis donc lancée dans un BEP pâtisserie pendant un an, en alternance chez Angelina. C’était une rude année, un choc culturel après le Celsa, j’étais réveillée tous les matins à 4h30, mais c’est le diplôme dont je suis la plus fière. 

Et après ?

Je suis devenue associée chez CCDessert, nous étions trois. Notre travail consistait à conseiller des clients de l’agroalimentaire, comme MacDo par exemple, pour les desserts. J’adorais ça, surtout visiter les usines, j’étais jeune, un peu dans le bluff au début et j’ai beaucoup appris. Nous nous sommes séparés au bout de 5 ans, chacun avait ses projets. J’ai expérimenté pas mal de choses : une marque de guimauve Indulgence, des soirées « bouffe et musique » avec les personnes du label Infiné, les « mardi gras » au Pavillon des canaux avec sandwichs du monde et concerts organisés. Puis la fin de l’été est venue et je me suis dit qu’il fallait que je trouve quelque chose de plus concret. Une amie à moi m’a dit : « Mais tu devrais postuler à la Grande Epicerie du Bon Marché, tu adores cet endroit », j’ai regardé le site et il y avait une offre « chef de projet marketing et sourcing ». J’ai postulé et après beaucoup beaucoup beaucoup d’entretiens, j’ai eu le job ! 

Pourquoi cet endroit t’attirait en particulier ?

Je l’ai toujours connu. Enfant, ma mère ne cuisinait pas beaucoup mais elle aimait les bons produits, et venait souvent ici. Quand j’étais en prépa au lycée Fénelon, j’habitais dans une chambre de bonne juste à côté, chaque semaine je faisais un tour à la Grande Epicerie. Je mettais des sous de côté pour tester des nouveaux produits. Il n’y a pas d’endroit comparable à Paris, c’est magique. 

En quoi consiste ton boulot ?

Je sélectionne les nouveaux produits pour la boutique. Je regarde ce qui se fait en consultant des sites, je vais aussi sur des salons à Londres et puis bien sûr je m’inspire de ce que me recommandent mes copains des restaurants. Je reçois plusieurs colis avec des produits que l’on m’envoie tous les jours. La sélection se fait assez logiquement : il faut que le produit soit bon, évidemment, le packaging joli de préférence, le prix correct, sans oublier tout le côté pratique (code-barre au bon endroit, etc.). On a déjà tellement de références qu’il faut que le produit ait quelque chose en plus. La sélection est assez rude, disons qu’une quinzaine de produits entre tous les mois. Les rayons ne sont pas extensibles.

Je m’occupe aussi des opérations thématiques. Cette année, Brooklyn. Je suis partie là-bas une semaine : c’était super de rencontrer les fournisseurs, sélectionner les produits, mais il fallait aussi gérer toutes les contraintes de la durée de vie des produits livrés par bateau et du prix qui ne devait pas être trop exorbitant au départ, à cause de la taxe qui s'ajoute.

Quels sont tes cinq produits préférés du moment ?

C'est difficile de n'en choisir que cinq... Mais je dirais les confitures Anatra, c’est une petite production corse avec des confitures aux agrumes qui viennent de là-bas, vraiment incroyables. Sinon, le sucre Galabé, Payet et Rivière, c’est un pain de sucre qui vient de la Réunion que l’on râpe, trop bon. Toutes les épices de Terre Exotique : le créateur de cette marque, Erwann de Kerros, est un vrai voyageur, je fais une obsession avec leur poivre en ce moment, j’en rajoute même dans mes gins tonic. Le beurre Bordier : on a toutes les variantes, le beurre au sel fumé est incroyable. Et puis une nouvelle marque qui va rentrer dans l’épicerie en janvier : L’Amante Verte, des infusions que prépare un cultivateur près de Rennes avec ses propres plantes.


Quels produits peuvent offrir les personnes qui n’ont pas encore de cadeaux de Noël ?

Les huiles Kalios : Il y a un très beau coffret, ce sont des frères grecs qui font cette huile tout près du village d’où je viens. Il y aussi un délicieux panettone Lazzaroni, en plus la boîte est hyper jolie. Et puis Le Miel des Merveilles, fabriqué par un créateur qui compose le miel un peu à l’image d’un parfum en dénichant les meilleurs miels du monde.

Dernière question : Quel est le pire produit que l’on t’ait envoyé  ?

Hum je ne sais pas… Ah si ! Une barre à la dinde séché. Elle est encore sur mon bureau, d’ailleurs.

Où ? La Grande Epicerie, 38 rue de Sèvres, Paris 6e.
Quand ? Du lundi au samedi de 8h30 à 21h.
Comment ? Métro Sèvres-Babylone.

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