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‘Sully’ : un coup dans l’eau pour Clint Eastwood ?

Écrit par
Alexandre Prouvèze
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Ou quand Clint Eastwood met sa maestria au service d’un thème anecdotique.

Sacré Clint ! Décidément, il n’en démordra pas, de ses héros virils, sans peur et sans reproche (ou presque), preux chevaliers de temps modernes aux méthodes pourtant parfois limite gênantes – coucou ‘American Sniper’ !

Interprété par un Tom Hanks à la fois passe-partout et convaincant, le héros de ce nouveau biopic est Chesley Sullenberger, dit « Sully », pilote de ligne ayant réussi l’exploit de poser son avion de ligne – et ses dizaines de passagers – en urgence sur l’Hudson, alors que les deux réacteurs de son avion étaient hors service. Voilà, c’est impressionnant. Mais c’est, aussi, à peu près tout.

Cette performance héroïque de Sully apparaît plusieurs fois dans le film, à la fois au premier degré (avec une reconstitution en deux ou trois parties, plutôt bien troussée) mais aussi au second, à travers la parole, lorsque Sully se voit harcelé par des compagnies d’assurance doutant de la légitimité de son geste et prétextant que le pilote aurait tout simplement dû… rentrer à l’aéroport ! Bah ouais.

Sully

Il faut dire que le plus étonnant dans ‘Sully’, ce n’est pas tant ce qu’il raconte que les images plus ou moins archétypales qu’il charrie. En particulier, celle d’une Amérique traumatisée par cette vision d’un avion fonçant droit sur des tours – hantise et spectre du 11 septembre qui aide à comprendre à quel point Eastwood s’adresse ici à son pays, à sa psyché collective. Un pays qui apparaît hystérisé, en proie au doute et en manque de héros ; capable, comme ici, de se jeter à corps perdu dans la starification (et les médisances qui vont avec) d’un homme qui a tout « simplement bien fait son travail » (expression qui constitue le principal leitmotiv du film).

Ce qui surprend le plus, toutefois, c’est qu’Eastwood mette toute sa maîtrise de la narration, une nouvelle fois impeccable de classicisme, au service d’un sujet dont lui-même, au fond, semble plus ou moins se moquer : aucune véritable plongée dans la psychologie de son héros n'a ici lieu (contrairement à ce qui était le cas dans le pourtant épineux ‘American Sniper’), aucune aspérité ni doute… Ce qui fait que ‘Sully’ ressemble à une toile de maître un peu creuse, à la fois impressionnante et trop inoffensive. Un atterrissage sur le fleuve avec des airs de coup dans l’eau.

Sully : bande-annonce

>>> 'Sully' de Clint Eastwood, avec Tom Hanks, Aaron Eckhart et Laura Linney (distribution Warner Bros. France). En salles mercredi 30 novembre 2016.

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