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On a testé pour vous : le karaoké asiatique

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« Karaoké » au Japon ou « Noraebang » en Corée, ces salles privatives pullulent en Asie : rien qu'à Séoul, il en existe presque 9 000. Souvent, on les trouve dans des caves de restaurants ou dans des sous-sols d'immeubles. A l'abri des regards moqueurs, on peut alors y finir le repas avec une bouteille de saké, le micro à la main. Dans certains, comme aux Etats-Unis, il est même possible de s'y rendre avec sa propre cargaison d'alcool, selon la devise BYOB (pour « Bring Your Own Booze »).

A petite dose, le concept s'exporte aussi à Paris, pour le plus grand bonheur des fêtards timides et autres casseroles intrépides. Mais en raison de leur faible nombre, et surtout parce qu'ils fonctionnent sur le bouche à oreille, ils sont ici nettement plus discrets. Après d'intenses recherches sur des forums et quelques interrogatoires d'amateurs éclairés, nous en avons testé un.

Koba, à première vue, n'est qu'un restaurant japonais : on a beau scruter la devanture à la recherche d'un indice, rien n'indique « karaoké ». On s'installe alors pour engloutir une montagne de sushis – les meilleurs de Paris, vous diront certains habitués –, puis on appelle le patron pour lui dire que l'on souhaite se rendre au karaoké. Lui, t-shirt troué recouvert de plâtre et accent incompréhensible, acquiesce en souriant. Le temps de mettre la main sur une télécommande rabibochée avec du scotch, et l'homme vous invite d'un geste à sortir dans la rue.

Car pour le karaoké, l'action ne se déroule pas dans le restaurant, mais deux portes plus loin, dans un bâtiment visiblement abandonné, aux vitres poussiéreuses et dont l'obscurité ne laisse rien présager de très flamboyant. Leçon numéro un : si l'idée de s'offrir un karaoké privé comporte de nombreux avantages, il vous faudra toutefois renoncer à son côté paillettes et boule à facettes.

Cafards et vieux tas de chaises. Le décor qui se plante est propice aux mauvaises blagues sur la mafia chinoise. Le patron explique que la salle est en travaux. Dans le noir, on s'approche avec hésitation de l'escalier au fond de la pièce. « Faites attention, le ciment n'est pas sec. Enjambez les marches, comme ça », mime-t-il.

Après quelques acrobaties, on arrive donc en bas pour suivre le guide dans un long couloir aux murs dénudés, enjambant les câbles qui traînent au sol, avant qu'il ne nous ouvre une porte, tout fier : « C'est ici ! » Ici, c'est une pièce exigüe d'environ 7 mètres carrés, avec une table, six chaises collées au mur et une télé. Déco minimaliste, ambiance intimiste.

Premier défi : apprivoiser la machine, car le menu de la télé est en japonais, il faut donc tripoter la vieille télécommande à l'aveuglette avant d'en comprendre le fonctionnement. On choisit assez rapidement les premiers titres, car l'heure tourne et le karaoké asiatique fonctionne par forfait. Vous pouvez y passer une, deux, trois ou quatre heures, à raison de 10 euros par heure et par personne. Et si vous êtes cinq, le saké est offert.

Les manuels de chansons, dont certains ne tiennent qu'à un bout de scotch, répertorient des milliers de morceaux, français, anglais, japonais. L'offre est assez inégale : alors que Britney n'a droit qu'à trois ou quatre tubes – indignez-vous –, Bon Jovi se voit occuper une page et demie ! Attention également à ne pas se tromper dans les chiffres, si vous ne voulez pas vous retrouver obligés de chanter "Foule sentimentale" en japonais...
Pour se chauffer les cordes vocales, commencez par un classique, "This Love" de Maroon 5, avant d'enchaîner sur "Oops I Did It Again" de Britney Spears. Puis, le saké aidant, prenez des risques. Car oui, leçon numéro deux : maintenant que vos karaokés se déroulent en privé, vous pouvez tout oser, des vocalises de Mariah Carey au rap de Jay-Z en passant, pour les plus téméraires, par du Led Zeppelin (attention tout de même à ne pas casser l'ambiance).

Et si vous ne chantez pas, il y a d'autres moyens de vous divertir. Sur l'écran, chaque nouveau « clip » déclenche une vague d'hilarité, entre fonds d'écran Windows 98, filtres de couleur et images embuées mais vaguement sensuelles qui rappelleraient presque les téléfilms érotiques de Direct 8.

Enfin, rien de tel que de finir la soirée sur une (fausse) note émotive, avec "My Heart Will Go On" de Céline Dion ou, au choix, "I Will Always Love You", de feue Whitney Houston. Avant de remonter à la surface, les yeux embrumés, la voix enrouée et les oreilles sifflantes. Et d'emporter avec vous le secret, de moins en moins bien gardé, du karaoké asiatique.

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Image d'illustration : CC by Yuka Tamai

Restaurant Koba : 7 rue La Michodière, 2e, 01.47.42.16.58

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