Daniel Linehan n’a pas 30 ans et déjà derrière lui un bien beau parcours. Né à Seattle, il est passé par la case New York, avant d’atterrir à Bruxelles au célèbre PARTS (Performing Arts Research and Training Studios, une école de danse contemporaine dirigée par Anne Teresa de Keersmaeker). Rien que ça. Sous les airs de jeune homme sage de Linehan se cache déjà un chorégraphe hors pair. Après avoir surpris le public français avec ‘Not About Everything’ – une performance où il tourne en rond pendant une demi-heure –, il investit jusqu’au 9 novembre la scène du théâtre de la Bastille avec ‘Zombie Aporia’.
Pendant ces cinquante minutes divisées en sept tableaux, le trio de danseurs-chanteurs contrarie le chant en contractant le corps. Une tentative d’épuisement du verbe par le mouvement, des vers du poète américain John Ashbery jusqu’à la verve excitée des Sex Pistols. Thibault Lac manipule, Salka Ardal Rosengren chante, Daniel Linehan scande ; et vice versa. « The music is the inspiration for the dance. Music justifies the dance. Music is a private experience. » Les mots sont fredonnés, chuchotés, interprétés. Les corps s’étirent, se tordent, copient. Avec frénésie, les danseurs reproduisent la chorégraphie diffusée sur un écran d’ordinateur. Le spectateur assiste ainsi à une sorte de karaoké du geste. Alors on se demande qui, de l’homme ou de la machine, dirige l’autre. La question reste entière.