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Fraternité, conte fantastique

  • Théâtre
  • 4 sur 5 étoiles
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Fraternité, conte fantastique
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Après Saïgon, récit choral sur la mémoire collective autour de la guerre d’Indochine, Caroline Guiela Nguyen revient cette année avec un projet tout aussi ambitieux, et tout aussi réussi. Avec Fraternité, conte fantastique, l’autrice et metteuse en scène française s’émancipe cette fois de l’Histoire avec un grand « h » pour plonger radicalement dans la fiction, en s’essayant – fait rare au théâtre – à la science-fiction. Poétique, drôle et émouvant, le spectacle est un ovni du genre, à voir absolument.  

Le postulat de départ est tout de suite posé : suite à une éclipse totale, 50% de la population mondiale a disparu. Dans ce peuple amputé de moitié, les cœurs sont tellement lourds que leur poids finit par ralentir le cours du monde et de l’univers tout entier. Sur scène, des hommes et des femmes, acteurs professionnels et amateurs tous issus d’origines et d’horizons différents, font le pari de la fraternité pour affronter la solitude qui leur a inexplicablement été imposée. Au sein d’un « centre de soin et de consolation », chaque personnage vit ainsi son drame personnel à sa manière, tout en s’inscrivant dans la grande épopée collective d’une quête de sens et de consolation. 

Si l’on retrouve dans Fraternité des thèmes (la relativité du temps, la place de l’homme dans l’univers) et une structure dramaturgique chers à un Christopher Nolan, Caroline Guiela Nguyen n’en va pas moins à rebours de certains attendus du genre. Aussi, à la différence des schémas hollywoodiens, Fraternité est une œuvre de science-fiction profondément poétique et humaine, où la NASA s’intéresse autant aux battements du cœur des hommes qu’aux mouvements des astres dans l’espace. Elle privilégie l’émotion à l’action, et construit des personnages forts et contrastés dans lesquels on peut tout à fait se projeter. Finalement, comme dans l’excellente série The Leftovers, dont le pitch initial est semblable à celui de la pièce, le fantastique est surtout un levier philosophique et la science-fiction devient un véritable laboratoire métaphysique. 

Parce que l’intérêt de la science-fiction réside moins dans la surenchère d’effets spéciaux spectaculaires que dans la manière de poser certaines questions, la pièce s’en tient à un dispositif scénique minimaliste et plutôt réaliste qui évolue peu au cours du spectacle. Les « deus ex-machina » qui ponctuent la pièce ne sont pas d’ordre techniques et visuels, ils sont partis prenantes d’une dramaturgie faisant la part belle aux nœuds et retournements, nous amenant au fil du texte à appréhender le plateau et ses divers éléments d’une nouvelle manière. A la fin du spectacle, on aurait presque envie de le revoir une nouvelle fois armé de tout ce que l’on sait désormais pour en faire une seconde lecture éclairée. Un sentiment somme toute assez rare après une pièce de 3h… qui passent d’ailleurs incroyablement vite. 

Alix Leridon
Écrit par
Alix Leridon

Infos

Adresse
Prix
De 8 à 37 €
Heures d'ouverture
Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h. Relâches les 28 septembre et 12 octobre.
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