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Une Chambre en Inde

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  1. Une Chambre en Inde
    © Michèle Laurent
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Inspirée d'une forme traditionnelle de théâtre indien, la dernière création d'Ariane Mnouchkine oppose le rire à la peur.

Avec sa robe de chambre à fleurs, sa tignasse surmontée d'une couette de petite fille et son air affolé, Cornélia (formidable Hélène Cinque) est une metteur en scène « sans visions ». Une artiste française qui ne comprend rien au monde et ne fait aucun d'effort pour combler ses lacunes. Double clownesque d'Ariane Mnouchkine, ce personnage règne sur la dernière création de celle-ci comme un chef sans qualités, que tout le monde suit faute d'avoir mieux à proposer. Le Théâtre du Soleil ferait-il le deuil de ses belles utopies de théâtre épique et citoyen ? Au contraire. Jusque dans la chambre en Inde où Cornélia passe son temps à dormir et à désespérer de n'avoir aucune idée de spectacle, le monde s'invite. Dans toute sa violence et sa confusion, mais avec humour. 

Le Mahabharata vu du lit

'Une chambre en Inde' marque le retour d'Ariane Mnouchkine au théâtre oriental, qui a inspiré bon nombre de ses créations. La directrice du Soleil ne se détourne toutefois pas de l'ancrage occidental de ses précédents spectacles. 'Les Naufragés du Fol Espoir' (2010), épopée autour d'un réalisateur de films muets notamment, et son beau 'Macbeth' (2014) traduit par ses soins. Autour du lit de Cornélia, ce n'est pas seulement les attentats, Daech ou encore les guerres d'Irak qui font irruption dans un décor à l'indianité élégante et minimaliste, mais aussi les diverses influences d'Ariane Mnouchkine. Comme sortis d'un vieux tiroir, un Shakespeare et un Tchekhov viennent en effet trouver Cornélia, qui reçoit aussi la visite d'une troupe de Theru Koothu. Une forme traditionnelle de théâtre tamoul dont les récits sont issus des deux grandes épopées indiennes, le Mahabharata et le Ramayana, à laquelle la troupe du Soleil est allée s'initier au sud de l'Inde auprès d'un grand maître du genre.

Déclin de l'Occident ?

On retrouve dans cette 'Chambre en Inde' les compagnons habituels d'Ariane Mnouchkine, parmi lesquels Hélène Cixous à l'écriture et Jean-Jacques Lemêtre à la musique. A l'image de la société française urbaine, la troupe est aussi composée d'artistes venus d'ailleurs. Entre autres des Afghans du Théâtre Aftaab en Voyage, accueillis au Théâtre du Soleil en 2013 avec leur 'Ronde de nuit'. Tous, techniciens y compris, sont partis s'initier à l'art du Theru Koothu en janvier 2016. Soit peu après les attentats de Paris. Autour de leur Ariane de substitution, les comédiens ne se contentent donc pas de porter un constat d'échec de l'Occident et de son théâtre à penser le monde : ils mettent en fiction leur propre tentative de retrouver du sens après l'horreur. Après la sidération. Et ils le font avec la grandeur d'utopistes blessés mais toujours vaillants, par une démonstration de l'intérêt du mélange des mythes d'ici et d'ailleurs. 

Écrit par
Anaïs Heluin

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