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Olga Picasso

  • Art, Peinture
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Time Out dit

4 sur 5 étoiles

Evolution picturale d'une histoire d'amour, de la flamme des premiers jours au déclin de la passion.

Oui, le génie à sa part d'humain. Sa faille. Sa fragilité. Et cela fait du bien à notre pauvre ego de, parfois, la rencontrer.

Alors que Picasso demeure, dans l'imaginaire collectif, un peintre intouchable, presque un dieu de la peinture distancié et froid, la dernière exposition du musée Picasso dévoile sa facette d'homme amoureux. Et ce en consacrant une rétrospective inédite centrée autour de sa première compagne, Olga Khokhlova, dit Olga Picasso. Femme originelle parmi toutes les femmes qui ont défilé sous les pinceaux de l’artiste.

Femme d’influence

Comme la mère de Picasso, Olga fut l'une des rares figures féminines qui compta vraiment dans la vie de ce séducteur volage. Peut-être parce qu'il l'épousa ? Peut-être parce qu'elle lui donna un fils, son premier enfant ? Peut-être parce qu'elle rayonnait d'un exotisme russe irrésistible, elle, la danseuse qui quitta ses rêves de planches pour le suivre (ou pour plutôt poser devant son chevalet). Il n'empêche, Olga pointe toujours, plus ou moins expressément, le bout de son petit nez retroussé dans les toiles du maître.

Et surtout celle des débuts de leur idylle. Croquée sous tous les angles, dans toutes les postures et sans raison particulière, Olga est omniprésente. Presque une obsession. Des portraits classiques aux pastels et fusain, des toiles gigantesques aux études esquissées au crayon graphite qui saisissent d'un trait le réel, elle est partout. Représentée avec une douceur et une rondeur soulignant sa beauté dans ‘La Liseuse’, désirable et désirée. Aux yeux du peintre, Olga apparaît comme l'idéal, parfois même idéalisée, à l’image des ‘Trois danseuses’ de 1919 où sa jeunesse charnue et antique éclipse ses deux acolytes.

Même pensive et canonique, voire grave et mélancolique – à cette époque, vers 1917, la Russie s'embourbe dans la révolution et la famille d’Olga se trouve en grande difficulté –, la jeune femme demeure un canon de référence, valorisé comme un Ingres sous les assauts picturaux de son mari.

Mère à part entière

Aux alentours de 1920-1925, la situation entre les deux tourteaux se dégrade cependant, la flamme de leur passion vacille et cela se ressent concrètement dans le travail de Picasso – qui ne sait peindre qu'au travers du prisme de ses émotions, comme il l'avoue lui-même. De mélioratif envers Olga, son art se module, se détache. Alors qu'elle a donné naissance à Paul en 1921, Picasso ne l'a dépeint presque plus qu'en Madone, monument de chair voluptueuse mais purement reproductrice, pilier du foyer élargi au-delà du lit marital. Les compositions sont maternelles et sereines, la filiation prend la place centrale comme dans ‘Famille au bord de mer’. Olga est, elle, déclassée, toujours modèle mais plus forcément citée, en témoignent les intitulés des œuvres d'alors : 'Jeune femme', 'Femme au chapeau'. Symbole de son nouveau statut, une salle entière se dédie à Paul : car, après tout, un enfant demeure toujours une extension de sa mère, voire une partie intégrante de son être.

De l’amour à la peine

Si le couple battait de l'aile, les prémices d'une liaison entre Picasso et Marie-Thérèse Walter, entamée au milieu des années 1920, finissent d'achever le ménage. Le regard mi- bienveillant mi-indiffèrent du peintre pour sa moitié devient d'une amertume révélatrice. Dans ‘Grand nu au fauteuil rouge’, les traits d'Olga sont anguleux, son visage et son corps ne sont que masse informe et formes indicibles, d'une violence sans retenue. Aucun soin n'est apporté à ce portrait en pied, c'est même la rage qui semble avoir guidé la main de l'artiste. Une rancœur qui se ressent également dans un autoportrait du peintre, quasiment mangé par une Olga méconnaissable et castratrice. Heureusement que quelques photos d'archives nous ont préalablement donné une idée de ce à quoi ressemblait vraiment Olga, ici atrocement dénigrée. On s'essaie aussi à comparer la palette utilisée par Picasso pour sa nouvelle et son ancienne muse et le contraste s’avère plus que saisissant !

Enfin, l'exposition s’achève sur un tableau plus contemporain de Francesco Vezzoli, 'Olga Forever'. Une toile, ou plutôt une réhabilitation, rappelant l'abnégation d'une femme ayant abandonné ses ambitions pour la gloire picturale de son bien-aimé. Lui qui a tristement fini par ne plus pouvoir la voir en peinture…

Alors que 2017 marque le centenaire de la rencontre des deux amants, l'institution de la rue Thorigny ne met plus tant l'accent sur le créateur inspiré que sur la créature inspiratrice. Et cela fait du bien ! L'homme à femmes laisse ainsi la place à la femme d'un homme, figure aux mille visages, tour à tour maîtresse dévouée, sensuelle voire sexuelle, puis monument maternelle et enfin épouse bafouée, reniée, trompée. Un hommage sans concession mais un bel hommage, assurément.

Vous aimez la peinture ? Toutes les plus belles expos du genre pictural sont à retrouver dans notre sélection. De même, si vous voulez savoir quelle expos vous ne devez absolument pas rater, faites un tour sur notre dossier des meilleures expositions de Paris.

Écrit par
Clotilde Gaillard

Infos

Site Web de l'événement
www.museepicassoparis.fr/en/
Adresse
Prix
12,50 € l’entrée plein tarif
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