En flânant dans les galeries du 5e étage de la Cinémathèque (jusqu’au 11 janvier 2026), on mesure combien Welles a marqué le cinéma, tant par ses inventions formelles que par sa liberté créative. À l’instar de Shakespeare – dont il fut un grand adaptateur –, il a façonné une œuvre-cathédrale, immense et multiple. Le dernier extrait le rappelle avec justesse : on oubliera peut-être son nom, mais son empreinte, elle, restera. Une exposition qui, sans chercher à déconstruire la légende, a le mérite de la rendre vivante.
Dans Citizen Kane, le chef-d’œuvre d’Orson Welles, on tente de percer le mystère du mot « Rosebud » en retraçant la vie du magnat de la presse. Un cheminement que reprend la Cinémathèque avec My Name is Orson Welles, une exposition qui explore l’énigme d’un homme qui « s’est montré tout en se cachant derrière des masques ».
« Why are there so many of me and so few of you? », lançait George Orson Welles, génie touche-à-tout : acteur, réalisateur, producteur, scénariste, homme de radio, dessinateur ou magicien. Quarante ans après sa mort, on se souvient toujours du prodige de 25 ans derrière Citizen Kane (1940) et de sa légendaire adaptation radiophonique de La Guerre des mondes (1938), qui aurait semé la panique parmi des auditeurs persuadés d’une invasion extraterrestre.
Des jalons que l’on retrouve dès les premières salles du parcours chronologique. La Cinémathèque orchestre ici un voyage érudit dans la vie et l’œuvre d’un créateur insaisissable, appuyé sur une documentation impressionnante : photos de famille et de tournage, unes de journaux, affiches, storyboards, scénarios… et, bien sûr, des extraits de films. Une matière riche (peut-être un peu trop parfois ?). Le parcours, généreux et foisonnant, assume l’abondance tout en proposant une vraie mise en perspective : de quoi suggérer l’homme derrière le mythe, tout en laissant au visiteur la liberté de tisser son propre fil. On s’y promène avec curiosité, quitte à s’y égarer (ce que nous avons fait, trois heures durant, sans vraiment voir le temps passer).
Si l’exposition se veut accessible, elle est loin d’être « classique » dans sa forme : le mélange des médiums (photos, documents, objets), les projections d’extraits et un réel soin de scénographie dynamisent l’ensemble et rendent palpable la complexité de Welles, cet homme-orchestre souvent en avance sur son temps. Les salles déroulent son parcours avec un certain respect, et l’hommage fonctionne : on ressent la démesure.



