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24h pour découvrir le quartier de la Goutte d'Or

Écrit par
Zazie Tavitian
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A l’est de la butte Montmartre, du boulevard Barbès au boulevard de la Chapelle, le quartier sans doute le plus populaire du 18e. La raison ? Une très forte mixité (quarante communautés s’y côtoient), de nombreux logement sociaux (30 % recensés en 2013), des commerces africains variés, un tissu associatif très impliqué et une population attachée à l’âme de son quartier. Alors que les prix des loyers montent en flèche et que la ville de Paris souhaite y ramener de la diversité (formule que l’on entend bizarrement moins souvent quand il s’agit des quartiers bourgeois de la rive droite), le quartier recèle encore de restos (très) bon marché, de rades sympathiques et de commerces populaires et vivants.

Balade dans cet ancien territoire vinicole (« Goutte d'or » proviendrait de la couleur du vin blanc produit par les vignes) où vous allez pouvoir rencontrer en vrac : un vendeur de poules vivantes, le gérant d’une mercerie, le fondateur d'une brasserie et déguster du mafé, des tajines aux olives ou encore du vin nature…

 

La môme

9h : Prendre son petit dej à La Môme.
« Lion - Amour : romantisme et sensualité feront très bon ménage dans votre vie sentimentale. Travail : N'hésitez pas à vous lancer dans des projets qui peuvent paraître osés. Santé : une bonne cure de vitamines ne serait pas du luxe. » On ferme Le Parisien et on commande donc un jus de fruit pressé et des tartines dans ce petit bar de quartier où l’on se sent comme à la maison. Déco 70’s très éclectique : les habitants du quartier s’y sentent bien et y viennent aussi pour les tajines et le couscous du vendredi soir.

Sur la place juste en face, vous pouvez jeter un coup d’œil (et même visiter) à l’église néo-gothique où Louise Michel animait le « club de la révolution » pendant la Commune de Paris, église connue également pour avoir accueilli des migrants évacués par la force par la police en 1996. En remontant la rue Saint-Bruno, vous tombez sur l’association de la salle Bruno (logique) réunissant de nombreuses associations de la Goutte d'Or qui luttent pour favoriser le développement du quartier.

Villa Poissonnière ©ZT
M. Chat ©ZT

Pigment ©ZT

10h : Se balader sur les traces de Bashung Villa Poissonnière
Remonter la rue Polonceau, faites un petit détour à gauche par la rue Erckmann Chatrian et tombez nez à nez avec un tag de M Chat. Cet habitant du 18e a même rebaptisé une plaque de la rue sous le sobriquet de « Mann Chat ». Juste en face, c’est le collectif parisien du sud de l’Italie, Pigment, qui a peint l’école élémentaire avec des symboles géographiques en hommage à la Goutte d’Or. Retournez rue Polonceau et arrivez Villa Poissonnière. C’est dans ce passage privé plein de verdure et d’ateliers d’artistes qu’a vécu Bashung. Pour y entrer, deux solutions : jouer à l’espion et suivre un occupant ou nous soutirer le code (que nous avons nous-même réussi à soutirer en espionnant).

Pâtisserie El Andalousia ©ZT

10h30 : L’heure de l’en-cas
Arrivé rue de la Goutte d’Or, c’est déjà l’heure de prendre un petit encas. Si un quartier cultive bien la vraie « street food » (pas des sandwichs « revisités » à 11,50 €), c’est bien la Goutte d’Or. Entre les vendeurs de maïs grillé à chaque coin de rue, et les délicieuses mhadjeb (galette oignons poivrons) du marché Barbès le samedi matin, vous trouvez de quoi vous sustenter pour 3 € facile. Pour les pâtisseries orientales, c’est à El Andalouisa que ça se passe, on remarque à peine cette immense boulangerie au 25 rue de la Goutte d'Or, remplie de gâteaux orientaux. Le patron, adorable, y vend depuis vingt ans cornes de gazelles, pâte d’amandes à la pistache et plein d'autres sortes de merveilles à 1,50 € pièce.

La ferme parisienne

11h : Rencontre avec monsieur Zakary
Prenez à droite la rue des Gardes, traversez le square Léon où les gamins du quartier jouent au foot (et les plus vieux fument des joints le soir) et filez rue Myrha rencontrer monsieur Zakary. En plus d’être incollable sur le quartier, le propriétaire de La ferme parisienne détient la boutique la plus improbable du quartier : un commerce de poules et de coqs vivants. « C’était mieux avant quand tout le monde se disait bonjour », nous dit-il en saluant à peu près toutes les personnes qui passent dans la rue.

Tajine boulettes olives chez Sidi Rached ©ZT

12h : Manger un tajine chez Sidi Rached
C’est d’ailleurs monsieur Zakary qui va nous indiquer le tajine de chez Sidi Rached, au 66 rue Myrha, resto dans lequel on n’aurait jamais pensé déjeuner vu sa devanture moyennement sexy. Ca aurait été une grossière erreur : les plats entre 4 et 7 € que nous envoie le serveur Alim valent le détour. Comme ce tajine boulettes olives, dont il nous propose du rab (petite attention que l’on apprécie toujours).

Amadou Dia dans sa mercerie ©ZT

14h : Faire son shopping rue Myrha
Après un petit thé à la menthe, offert c’est l’heure d’une (grosse) session shopping : il faut dire que la rue Myrha ne manque pas de spots. A commencer par la mercerie de monsieur Amadou Dia, ce commerçant dans le quartier depuis quasi trente ans propose dans sa boutique boutons, ficelles et laines en tout genre. Juste en face, au 43, La régulière, une nouvelle librairie qui vient d’ouvrir où Julia et Alice proposent bandes dessinées, romans graphiques et livres jeunesses ; le lieu fait aussi café.
Au 40 de la même rue, ce sont deux frères Youssouf et Mamadou qui ont monté Maison Château Rouge, une boutique hybride entre vêtements en wax à la coupe moderne (100 % made in France) et jus d’hibiscus produit à Dakar. Une autre boutique qui prône, elle, le 100 % made in Africa ? Sawa, au numéro 37 : ici Medhi Slimani propose une ligne de baskets fabriquées en Ethiopie. Et si vous avez encore envie d’admirer des pompes, allez faire un tour chez Kata, rue Poissonniers, on ne vous promet pas que vous trouverez des groles magnifiques mais le cadre, un ancien théâtre, est étonnant (et aussi un peu déprimant).

Sawa ©EP

15h : Se faire une expo à l’institut des Cultures d'Islam
Après l’effort, le réconfort. Remontez la rue Stephenson qui coupe la rue Myrha et arrivez à l'ICI (Institut des cultures de d'islam). Ce lieu dirigé par Bariza Khiari organise de nombreux événements culturels gratuits mais aussi des débats et des cours d’arabe et de wolof. En ce moment, vous pouvez y voir une très belle exposition sur le blé : sacrées graines où les artistes contemporains mettent en scène la graine à la base du couscous, plat fédérateur et symbolique des pays arabes. A l'ICI, vous trouvez aussi un café dans le patio avec une formule dej à 10 € (5€ pour les séniors et étudiants), une salle de prière et normalement bientôt un hammam !

16h : Se balader rue Dejean
Reprenez la rue Stephenson, coupez rue de Doudeauville où vendeurs de tissus de wax et épiceries se succèdent, tournez rue Poulet (notre nom de rue préféré) et bifurquez rue Dejean. « Safou à 2 €, safou à 2 € » Ici, vendeurs de rue (qui vendent des safous, sortes de petites aubergines qui en fait n'en sont pas), boucherie halales et poissonneries se succèdent. A l’angle avec la place du Château Rouge se situe Le café social Dejean où l’association Ayyem Zamen aide les immigrés avec leurs retraites. Le café est aussi un lieu de rencontre ouvert toute la journée où des animations socio-culturelles sont proposées (comme des débats sur l’actualité) et où sont exposées des photos (en ce moment celles de Gilles Crampe sur les différents cultes à Paris).

La brasserie de la Goutte d'or
© EChirache

17h : Acheter une bière à la brasserie de la Goutte d’Or
Rue Myrha puis rue des Gardes (vous commencez à connaître le quartier comme votre poche), arrêtez-vous à la brasserie de la Goutte d’Or. Ici, depuis cinq ans, le brasseur Thierry Roche brasse sa bière qui est maintenant célèbre bien au-delà du quartier. Ouvert le jeudi et vendredi de 17h à 19h et le samedi de 14h à 19h, vous pouvez venir y déguster des bières comme la Château Rouge ou la Myrha. Bonne nouvelle : le lieu ne devrait pas tarder à aménager un bar à côté de la salle de brassage (on ne manquera pas de vous tenir au courant).

Défilé à L'EChomusée ©ZT

17h30 : Assister à un défilé de mode guinéenne à l’éco musée
Se balader à la Goutte d’Or c’est aussi faire des rencontres parfois improbables, comme assister à un défilé de mode guinéen à l’Echomusée. Cette association, au 21 rue Cavé, à la devanture jaune, décorée du fameux chat, accueille de nombreux événements comme des jams, des expos ou comme encore des défilés de mode guinéens.

Michel de la cave de Don Doudine ©ZT

18h30 : L’heure de l’apéro
C’est le moment de passer à la cave de Don Doudine, où Michel la cinquantaine, ancien régisseur dans le théâtre, vous proposera vins (tous bio ou nature) bien choisis, glaces artisanales, conserves et saucissons : bref de quoi se concocter un apéro digne de ce nom. Sa cave accueille aussi régulièrement des expos comme en ce moment celle de Chantal Montellier, dessinatrice de presse dans la veine de Claire Bretecher.
Si vous préférez boire au comptoir, tournez à droite rue Affre et descendez jusqu’au Tout-Monde au pied de l’église Saint-Bernard. Ici, comme l’indique le nom : tout le monde est le bienvenu pour déguster des canons à des prix réglos (à partir de 15 € la bouteille) accompagnés d'une bonne cuisine maison.

20h : Mafé trop bon
Après l’apéro, le repas, quitte à être dans le quartier africain autant manger un mafé, ou un thiebou ou un poulet yassa. Difficile de se repérer parmi les nombreuses adresses ? Demandez autour de vous. C’est comme ça que nous avons découvert Le Dibi, resto sénégalais de la rue Polonceau où l’on déguste de très copieux et savoureux mafés en matant à la télé les concours de lutte sénégalaise, tout en sirotant un jus de bissap.

21h : Voir un concert au FGO
Non ce n’est pas l’acronyme mal écrit de Franz-Olivier Giesbert, mais le Centre Musical Fleury Goutte d’Or, hyper actif dans le quartier. Outre les studios d’enregistrement et de nombreuses initiatives pour accompagner les jeunes artistes, cet établissement culturel de la ville de Paris propose une sélection de concerts, d’expos et de conférences hyper éclectiques et cohérentes. A venir par exemple ? Un live du groupe noise Papier Tigre le 17 novembre, une expo photo consacrée au punk, 'Punk is alive !' à partir du 22 novembre ou encore une carte blanche au groupe parisien Bon Voyage Organisation le 16 décembre.

L'olympic Café

23h : Boire un coup et danser à l’Olympic café
Arrivé 20 rue Léon devant l’Olympic Café, vous vous demandez pourquoi on ne vous a pas conseillé plus tôt de débarquer dans ce rade lambda. Outre les serveurs sympas et les pintes pas chères, il faut descendre les petits escaliers à la gauche du bar pour débarquer dans le sous sol. Ici plusieurs soirs par semaine, des musiciens se retrouvent pour jammer avec toujours un public prêt à les écouter (et à danser comme des foufous). Plus planqué qu’un speakeasy on vous dit !

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