Après la pizza chic (Daroco), la brasserie bling (Zebra) et un éphémère kebab de nabab (Rococo), Alexandre Giesbert – oui, le fils de – vient concurrencer Amagat dans la catégorie cuisine espagnole gentrifiée avec cette Casa Pregonda, inspirée par la Cala Pregonda, célèbre plage minorquine. L’annonce de l’ouverture avait bousculé la sieste postprandiale du Foodistan parisien car dans la brochette des associés se trouvent deux poids lourds des relations presse, Valentine Dubois et Nicolas Hoyet.
Le restaurant, posté dans le quartier piéton de Montorgueil, se montre évidemment beau gosse (le Giesbert sait y faire) avec grand comptoir carrelé, poutres apparentes, bougies et tables à touche-touche comme dans toute bonne taberna qui se respecte. La faune CSP+ brouhahate sur fond d'une muzak choisie par un prestataire d'ambiance. Ça fait le taf. La carte dopée aux produits de luxe (gambas carabineros, jambon bellota, caviar…) déroule des tapas tarifées pour business angel (7 € les deux pintxos, 9 € neuf pimentos…) et quelques plats typiquement minorquins comme la caldereta de homard (49 €) ou le caquelon de riz à l’encre de seiche avec trois crevettes pour deux (74 €). On harponne une assiette de trois croquetas de jambon bien croquantes et moelleuses à tremper dans une chouette sauce tomate ; un fondant crudo de dorade citronné comme il faut et une tortilla, format CD, hyper-fondante rehaussée d’une cuillère d’aïoli , avant une honnête crème catalane.
Dans le verre, une oubliable sangria de vin blanc (10 € !). On aurait mieux fait d’explorer plus avant la carte de vins cossue et très ibérique : blanc Binifadet de Minorque (49 €), catalan RIU du domaine L’Infernal (78 €)…
Rien à dire, tout était très bon et bien cuisiné mais le niveau stratosphérique de la cuenta (60 € par tête au moins pour sortir sans la faim) pose toujours la question de l'appropriation des recettes populaires par la bourgeoisie. Une cuisine espagnole qui se veut sincère mais qui oublie sa générosité.