Pour qui ? Un(e) sensualiste avide d’expériences
Plat culte ? Deux desserts signature : la glace au lait ribot, et le tocino de cielo revisité. Un jaune d'œuf confit coulant, zépo sur un socle de dacquoise (meringue à la poudre d’amandes), caramel fleur de sel… A gober d'une traite sous peine de s'en coller partout !
Le Danois à la table d’à côté s’en remet toujours pas. « Le Michelin, j’y comprends rien. Il avait mis une étoile ! Mais c’est pas un gastronomique, ça, c’est un bistrot ! » Comptoir en marbre, opalines vintage au plafond, réplique de la Coupe du monde de foot sur l’étagère, serveurs en Nike et Stan Smith : pas franchement l'esprit du Guide du pneu. Tout comme la cuisine d'Iñaki Aizpitarte, jamais consensuelle, toujours sur le fil. Treize ans déjà que le Basque balance ses uppercuts cinglants ! Parfois on passe à côté, parfois ça tape en plein dans le mille.
Toujours en tension, les assiettes du chef osent des associations couillues, avec çà et là de vraies fulgurances créatives. Au menu du soir (75 €), un quinté gagnant d’amuse-bouche : des gougères, un shot suracide de ceviche (sans poisson) où flotte une framboise, un fin cigare en feuille de brick, fourré de sardines épicées tandoori, et surtout cette tomate farcie à l’encornet et légumes, avec piment guindilla à croquer, qui achève de vous dépuceler la goule. Mais la vraie claque, on se la prend sur le bouillon de céleri-rave. Pif paf : douceur puis baffe acide lorsqu’on croque les trois petites ravioles fourrées au coing !
Niveau plats, bof sur la noix de Saint-Jacques, finement tranchée et recouverte d’un voile de papada (gorge de porc ibérique). Feuille de capucine émincée, baby poireau, échalote… Trop de rajouts acido-vinaigrés qui tuent l’iode. Mieux, ce lieu jaune servi dans une nage de jus de moules, maïs albinos croquant et fleur de fenouil. Magistral, un tendrissime chevreuil à la royale, classique saisonnier réveillé par une singulière tartelette de girolles, haricots coco, haricots noirs fermentés.
Puis vient l’instant de grâce : ce moment où, au comptoir, on avise une carafe de bourgogne du Clos des Vignes du Maynes (cuvée Auguste 2017). Du pinot fin, une variété très rare de pinot noir, facturé ici à prix d’ami (5,50 € le verre).