Toutes les diasporas n’ont pas le même poids dans le game de la cuisine parisienne. Prenez l’Asie du Sud-Est : la capitale croule sous les restaurants thaïs ou vietnamiens, l’Indonésie commence à se réveiller, mais les Philippines (115 millions d’habitants quand même) restent totalement sous-représentées. Heureusement, Erica Paredes, ex-cheffe volante passée par Mokoloco, a décidé d’y remédier et propose sa vision de la cuisine de l'archipel entre souvenirs d’enfance et habile bistrote tropicalisée par des ingrédients peu courants. Pas de boui-boui style marché de Quezon City ici, Reyna est une adresse bien dans son époque, un chic couloir vieux rose, miroir et béton ciré avec une BO électronisante où l’on sert des « petites assiettes » à partager.
On picore donc des asperges vertes grillées enveloppées dans une douce sauce coco, électrisées par du tamarin ; un poulet frit de compétition à la chapelure aérienne glacée au nuoc-mâm, à tremper dans une sauce chaude comme l’été à Manille. Les pâtes à la truite fumée se retrouvent sauvées d'une certaine banalité par une habile bisque citronnée. Et en convaincant dessert franco-philippin, une crème caramel acidulée au calamansi (citron vert de là-bas) et kumquat confit.
Bien dans l’époque, la carte des vins ne convoque que du nature : rhône Self Love de Justine Vigne (44 €), languedoc Nada Revolucion blanc de Vandal Wine (40 €). Attention, si vous avez une petite soif, les prix au verre sont prohibitifs : tout à 10 € ! En conclusion, une séduisante cuisine peu vue ailleurs dans un cadre branchouille lui un peu trop poncé !